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ASSURANCE Économie de l'assurance

Risque moral

Autoprotection et autoassurance

Il y a risque moral lorsque l'assureur ne peut vérifier les efforts de prévention des risques de l'assuré. Selon la terminologie introduite par Isaac Ehrlich et Gary Becker, la prévention des risques comprend l'autoprotection qui réduit la probabilité de subir un sinistre et l'autoassurance qui diminue la gravité des dommages en cas de sinistre.

Le dilemme incitation-assurance

En situation de risque moral, un dilemme apparaît entre le partage des risques, qui est la finalité même de l'assurance, et l'incitation à l'effort de prévention. En effet, on a vu que, dans le cas simple où la prime est actuarielle, un individu qui a de l'aversion pour le risque choisit un contrat qui le protège complètement du risque. Dans un tel cas, il n'a aucune incitation à faire des efforts pour réduire son exposition au risque puisqu'il est totalement indemnisé en cas de sinistre. Pour rétablir un niveau adéquat d'incitation, il faut faire peser sur ses épaules une partie des conséquences des sinistres éventuels. Cela passe soit par une couverture partielle, soit par une indexation des primes futures sur le nombre et la gravité des sinistres dont l'individu est responsable, comme dans le cas des bonus-malus.

Barème d'indemnisation

La question du barème d'indemnisation optimal en cas de risque moral a été étudiée par Bengt Holmström et Steven Shavell. Trois résultats en ressortent. En premier lieu, un contrat standard avec franchise est optimal lorsque l'effort de l'assuré peut réduire la probabilité de subir un sinistre, la distribution de probabilité de dommages en cas de sinistre étant une donnée non susceptible d'être modifiée par le comportement de l'agent (c'est une pure loterie dont les résultats ne peuvent être influencés). L'intuition de ce résultat est la suivante. Pour inciter l'assuré à réduire la probabilité d'accident, il convient de lui infliger une pénalité par rapport au contrat de couverture complète qui prévaudrait si aucun problème d'incitation à l'effort ne se posait et si on néglige l'effet d'un éventuel taux de chargement sur la demande d'assurance. Toutefois, sous les hypothèses précédentes, le montant des dommages n'est pas « informatif » sur l'effort de l'assuré : on ne peut tirer davantage d'informations d'un accident grave que d'un accident bénin. En conséquence, la pénalité n'a pas de raison de varier avec le montant des dommages, car ce serait faire courir un risque supplémentaire non justifié à l'assuré. Le barème optimal devrait donc spécifier une indemnité égale aux dommages moins une pénalité constante. Cette règle conduirait en fait à une indemnité négative pour les petits dommages, ce qui n'est évidemment pas possible. Le barème optimal prévoit donc simplement qu'aucune indemnité ne sera versée tant que les dommages sont inférieurs à cette pénalité qui est en fait la franchise, l'assureur payant une indemnité égale à la différence entre dommages et franchise dans le cas contraire. Ce sont bien là les caractéristiques d'un contrat standard avec franchise.

Le deuxième résultat vient en contrepoint du premier : lorsque l'effort de l'assuré affecte la distribution de probabilité des dommages en cas de sinistre, alors une règle de coassurance est optimale. En d'autres termes, l'accroissement des indemnités devrait être inférieur à l'accroissement des dommages. Le troisième résultat est que le contrat d'assurance devrait tenir compte de tous les signaux qui sont informatifs sur l'effort de l'agent, c'est-à-dire des variables qui apportent une information supplémentaire sur cet effort, en plus de l'historique des sinistres et de leur gravité.[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris X-Nanterre et à l'École polytechnique

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