ASTHME ET IMMUNITÉ INNÉE
L’asthme et d’autres maladies allergiques du système respiratoire, comme les rhinites allergiques, sont en augmentation depuis plusieurs dizaines d’années dans presque tous les pays. On peut même, selon Thomas Platts-Mills, un allergologue de l’université de Virginie, tenir l’asthme pour une sorte d’épidémie qui ne cesse de se développer depuis 1870. Le phénomène est particulièrement criant chez les enfants. Les années 1870 marquent le début de l’urbanisation massive et du dépeuplement des campagnes, un changement de style de vie, le développement majeur des pollutions industrielles, etc. Pour l’opinion publique, l’évolution de la vie moderne (développement des villes, de la chimie, etc.) est responsable de la recrudescence de ces maladies respiratoires. Qu’aurions-nous donc progressivement perdu depuis la fin du xixe siècle et qui nous protégeait ? L’augmentation des expositions au risque explique-t-elle tout ?
Plusieurs études montrent que certains aspects de la vie rurale traditionnelle exercent un effet de protection durable contre l’asthme, par l’intermédiaire de l’éducation du système immunitaire inné.
Asthme des villes et asthme des champs
Les phénomènes physiopathologiques à l’origine de l’asthme sont assez bien connus. La maladie appartient à la grande famille des troubles allergiques. De manière générale, la reconnaissance d’un allergène par des anticorps spécifiques de cet allergène entraîne une réaction immunitaire exacerbée, dangereuse et parfois mortelle (choc anaphylactique, œdème de Quincke, asthme, etc.). Logiquement, l’augmentation en fréquence de la maladie peut être due soit à celle des produits allergéniques avec lesquels le sujet est en contact, soit à la diminution de systèmes protecteurs dans l’organisme, la fréquence observée étant la résultante de ces deux tendances. Il est plus facile de tester in vivo et in vitro les substances et les situations qui initient ou amplifient un symptôme asthmatique. L’accent a donc été mis sur l’identification des substances allergéniques et sur les précautions à prendre. De nombreuses études montrent que divers composants de l’environnement – qu’ils soient industriels ou naturels (pollens, acariens, etc.) – jouent un rôle important dans le déclenchement de crises d’asthme. L’augmentation de fréquence de cette maladie est ainsi largement et raisonnablement attribuée à la variation en quantité et en diversité des substances allergéniques auxquelles on est exposé.
En ce qui concerne d’éventuels effets protecteurs, leur recherche est difficile. D’ailleurs, dans quelles situations pourrait-on les observer ? Depuis le début du xxie siècle, on s’intéresse à l’épidémiologie de la résistance à l’asthme dans certaines populations où cette maladie est peu fréquente. Des données acquises depuis 2002 en Europe centrale (Allemagne, Autriche et Suisse) et aux États-Unis montrent que le fait d’avoir grandi dès le plus jeune âge dans une ferme traditionnelle et en contact avec les animaux et leur environnement microbien (phénomène appelé farmeffect) constitue une protection contre l’asthme. Elles viennent conforter une opinion courante, mais jusqu’ici non prouvée.
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Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
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Média