ASTROPARTICULES
Le concept d'astroparticules exprime le lien de plus en plus étroit qui s'est établi entre physique des particules, astrophysique et cosmologie : dans la première moitié du xxe siècle, l'observation des rayons cosmiques conduit à la mise en évidence du positon, du muon et des cascades électromagnétiques ; ces recherches culminent à la fin des années 1940 avec la découverte des mésons, des rayons cosmiques primaires (constitués de protons et de noyaux d'atomes) et des grandes gerbes. Les accélérateurs supplantent ensuite les rayons cosmiques comme sources de particules, au cours d'une période prolifique d'où émergera le modèle standard des particules. De leur côté, l'astrophysique et la cosmologie observationnelle vont bénéficier de nouveaux instruments embarqués à bord de fusées et de satellites ainsi que des avancées dans les techniques des détecteurs au sol.
Le terme « astroparticules » désigne ainsi les messagers de l'Univers, proche ou lointain, à la fois source et laboratoire de physique des particules et de cosmologie, impliquant la physique microscopique et celle de l'Univers primordial : neutrinos, dont l'énigme de la masse semble près d'être résolue, rayons gamma et neutrinos de haute énergie, rayons cosmiques de très haute énergie qui entrent, malgré leur rareté, dans une phase de détection intensive, ondes gravitationnelles.
L'astronomie des neutrinos
Les neutrinos (ν), produits en grande abondance par des processus divers à des énergies qui s'étendent de 10—5 à 1015 électronvolts, peuplent l'Univers à raison d'environ 300 par centimètre cube. Sont-ils massifs ? Les mesures directes de leur masse, très difficiles, donnent des limites supérieures, mais plusieurs expériences ont fourni des indications de la présence d'oscillations entre les trois espèces de neutrinos (νe, νμ et ντ) associées aux trois leptons chargés (électron, muon et tau) ; ce phénomène quantique de changement d'identité au cours de la propagation est lié à une masse non nulle du neutrino. Dans le cas simplifié de deux espèces de neutrinos, la probabilité de transformation oscille au cours du temps de propagation avec une amplitude égale à sin2(2θ), où θ est appelé angle de mélange, et une fréquence proportionnelle à Δm2, différence du carré de leurs deux masses. La longueur d'oscillation correspondante est proportionnelle à leur énergie E et à 1/Δm2. Sans indication a priori sur les paramètres d'oscillations, il est nécessaire d'explorer tous les couples possibles [sin2(2θ), Δm2]. La recherche de petites valeurs de Δm2 exige par exemple que le rapport E/L (où L est la distance entre source et détecteur) soit petit.
Les neutrinos solaires sont abondamment produits par les réactions de fusion au cœur du Soleil : le flux de neutrinos électroniques (νe) au niveau de la Terre atteint 65 milliards par centimètre carré et par seconde. Cinq expériences, dont une pionnière, datant des années 1960 – celle de Raymond Davis, Jr., dont le détecteur est installé à 1 500 mètres sous terre, au fond d'une mine d'or désaffectée, à Homestake (Dakota du Sud) –, détectent chacune une partie du spectre en énergie des neutrinos provenant de réactions nucléaires différentes. Les flux mesurés montrent tous des déficits importants par rapport aux prédictions issues d'un modèle astrophysique du Soleil fondé sur des hypothèses bien établies. L'interprétation de ces déficits est complexe, les neutrinos électroniques étant produits au cœur du Soleil dans une zone de densité élevée qui implique des schémas d'oscillation différents du cas dans le vide pour lesquels on attend, respectivement, des solutions autour de Δm2 = 10—5 et 10—10 électronvolt au carré.
Les neutrinos atmosphériques ont été[...]
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Écrit par
- Pierre BAREYRE : conseiller scientifique au Collège de France (physique corpusculaire et cosmologie)
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