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ASURA

Les dieux du panthéon védique sont divisés en deux classes : les dévas et les asuras (prononcer : assoura). Le premier terme dérive de la racine div-, qui désigne la lumière du ciel diurne ; le second signifie « souffles de vie ». Il s'agit donc de deux mots également dignes d'évoquer les puissances célestes qui gouvernent la vie des créatures. Et, pourtant, cette division de la population divine, qui se retrouve d'ailleurs dans d'autres domaines de la mythologie indo-européenne (et qui fait penser à la distinction entre dieux Ases et dieux Vanes des légendes germaniques), s'est transformée chez les Indo-Iraniens en une rivalité inexpiable. Dans l'Iran mazdéen, les asuras (ahuras) l'emportent et leur chef Ahura Mazda règne sur l'univers, rejetant les dévas (daévas) au rang de démons. Inversement, l'Inde reconnaît la souveraineté d'Indra, roi des dévas, et tient les asuras pour des êtres maléfiques, ennemis des dieux.

À partir des Brâhmanas (~ Ier millénaire) et jusque dans l'hindouisme classique, les asuras sont de véritables démons qui mettent en danger l'équilibre cosmique. Ainsi Krishna, incarnation du déva Vishnu, lutte-t-il contre les asuras, au même titre que les déesses Durgâ, Kâli, Chandî. L'interprétation de cette situation est difficile, d'autant plus que les hymnes du Rig-Véda (ṛgveda, la partie la plus archaïque du Véda, du début du ~ IIe millénaire) conservent le souvenir du temps où les asuras avaient le pas sur les dévas. Varuna, Mitra, d'autres encore sont appelés « asuras », avec révérence. Mais, justement, la royauté universelle d'Indra (le déva par excellence) est le résultat d'une usurpation : le dieu fils a détrôné son père (or, Varuna est constamment appelé le « Père » dans les hymnes du Rig-Véda), tout comme Zeus assura sa puissance en combattant les Titans et son propre père. Il y a donc là un mythe important, commun (sous des formes diverses) à l'ensemble indo-européen, mais cette constatation ne suffit pas à en rendre compte, ni surtout à expliquer le renversement de la situation dans l'Avesta iranien.

— Jean VARENNE

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Lyon-III

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