- 1. Historique
- 2. L'ouvroir et la boutique. L'atelier artisanal
- 3. L'atelier européen du XVe au XVIIe siècle. Périmètre technique et espace imaginaire
- 4. L'atelier européen au XVIIIe siècle. Écoles et académies
- 5. L'atelier cénacle. Sanctuaire romantique et grand atelier de la nature
- 6. L'atelier du XXe siècle. L'architecture d'atelier. Chantiers et laboratoires
- 7. Bibliographie
ATELIER, art
L'atelier du XXe siècle. L'architecture d'atelier. Chantiers et laboratoires
L'usage du travail en plein air facilité par les maisons de campagne est désormais établi : l'Académie des beaux-arts continue de dispenser un enseignement auquel nul n'est tenu de se soumettre. Les musées se répandent et sont depuis un siècle une école silencieuse où chacun peut apprendre à voir et par l'imitation à créer. Que sont devenus les ateliers ? À partir de 1920 environ, les architectes construisent systématiquement des ateliers, ménageant dans le cadre urbain des lieux appropriés au travail artistique. Ce sont souvent de vastes studios à verrière situés dans les quartiers préférés des artistes : Montmartre et Montparnasse, qui drainent à Paris la plus grande partie des artistes européens et même d'outre-Atlantique ; pour ceux-ci, l'itinéraire d'un artiste passe au moins pour un temps par Paris quand ce n'est pas pour une installation définitive. La Provence est l'annexe de la capitale, de Cézanne à Picasso, le Var et les Alpes-Maritimes sont régulièrement envahis par les artistes qui y trouvent à la fois l'atelier naturel de plein air et l'architecture d'atelier importée de la capitale. À Paris même, l'artiste devient homme d'intérieur. Son atelier à verrière et soupente est son univers. L'atelier est un monde complet où s'accomplit un travail cosmogonique souvent acharné et presque toujours solitaire. C'est sa chambre et son royaume, et l'on peut y voir ses toiles, ses modèles, ses objets. Ce que cet atelier a de commun avec les plus vieux ateliers traditionnels, c'est que, plus que jamais, ce périmètre sacré matérialise une conception de la création. Mais l'individualisme est tel qu'on ne trouve pas deux ateliers identiques. Chez Van Dongen, nous pénétrons dans un hôtel particulier : l'atelier a des proportions monumentales ; partout des objets de valeur. C'est l'atelier musée qui dénote le goût du spectaculaire chez un homme du monde. Chez Bourdelle, c'est un vaste chantier fait de salles successives qui aboutissent à leur tour à une pièce musée. On va de la bohème à la sophistication, du désordre sacré au cadre théâtral, en passant par le bric-à-brac surréaliste et le musée d'art nègre. En 1925, Fegdal qui visitait les ateliers finit par s'écrier après son passage chez Quelvée : « Atelier, tour d'ivoire aux parois de cendres, c'est la solitude brûlante qu'on trouve en vous, la solitude qui exalte le cerveau, avec le silence qui fait surgir l'œuvre des limbes grises ! » Il semble, à lire Fegdal, que l'on ne sait plus guère ce que l'on dit en sortant de pareille atmosphère delphique. Severini, qui ne lui avait accordé qu'une audience téléphonique, lui avait pourtant dit : « Votre bouquin s'intitule Ateliers d'artistes ? Chez moi, c'est un atelier d'ouvrier ! » Il apparaît que l'observateur est complice de la mise en scène. Il a faim d'une imagerie frissonnante et mystérieuse ; il lui faut croire qu'il pénètre une intimité qui donne le vertige évitant d'affronter la réalité technique et laborieuse qui toujours sous-tend la création.
Or cette réalité technique prend aujourd'hui une force nouvelle. Les artistes reviennent au travail austère, semblent fuir, sauf exception, les exhibitions spectaculaires de leur labeur. Cela accompagne une initiation des créateurs à des techniques austères et difficiles. La recherche d'effets esthétiques à travers un matériel déjà industrialisé, une matière déjà transformée, avec des machines nécessitant une formation scientifique fort avancée, expulse les artistes de leurs ateliers douillets vers la froideur des laboratoires, des salles d'expérimentation, des constructions abritant les[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Marie-José MONDZAIN-BAUDINET : attachée de recherche au C.N.R.S.
Classification
Médias
Autres références
-
AMAURY-DUVAL EUGÈNE EMMANUEL PINEU-DUVAL dit (1808-1885)
- Écrit par Bruno FOUCART
- 439 mots
Sans doute l'un des plus originaux et des mieux doués des élèves d'Ingres, Amaury-Duval se contenta d'une carrière honorable et discrète. Peintre à la production rare, appartenant par sa famille à l'intelligentsia parisienne (son père, membre de l'Institut, fondateur de la ...
-
ARCHITECTURE (Thèmes généraux) - L'architecte
- Écrit par Florent CHAMPY , Carol HEITZ , Roland MARTIN , Raymonde MOULIN et Daniel RABREAU
- 16 589 mots
- 10 médias
...attribuait les récompenses. Les Prix de Rome, architectes de droit des bâtiments civils et palais nationaux, avaient le quasi-monopole des commandes publiques. Les patrons nommés des ateliers « intérieurs » de l'École des beaux-arts (sinon ceux des ateliers « extérieurs », appelés et révocables par les élèves)... -
ART SACRÉ
- Écrit par Françoise PERROT
- 5 359 mots
Le but était de faire renaître l'atelier médiéval que la Renaissance avait supprimé. Cette idée apparaît déjà dans les Notes sur la peinture religieuse (1896) : « Si Dieu m'avait donné de naître quelques siècles plus tôt, à Florence au temps de frère Savonarole, certainement j'aurais été... -
L'ATELIER D'INGRES, Eugène Emmanuel Amaury-Duval - Fiche de lecture
- Écrit par Adrien GOETZ
- 1 026 mots
- 1 média
À partir de 1825, jusqu'à son départ pour l'Italie en 1834, lorsqu'il devint directeur de l'Académie de France à Rome, Ingres dispose à Paris d'un atelier privé, proche de l'École des beaux-arts, où ses nombreux élèves le vénèrent comme un chef incontesté : Henri Lehmann, Raymond... - Afficher les 36 références