ATHÉNAGORAS Ier (1886-1972) patriarche de Constantinople (1949-1972)
Le patriarche Athénagoras a joué un rôle déterminant dans l'évolution contemporaine de l'Église orthodoxe et du Mouvement œcuménique.
Né dans l'Épire encore ottomane, il étudia à la faculté patriarcale de Halki puis devint secrétaire de l'évêque de Monastir, en Macédoine, pendant les guerres balkaniques et la Première Guerre mondiale. Il fit ainsi l'expérience de la diversité des hommes et des tragédies de l'histoire. Replié en Grèce en 1918, il fut désigné comme métropolite de Corfou et donna la mesure de ses qualités pastorales dans une des plus graves crises qu'ait connue la Grèce moderne en s'interposant entre la population de l'île et l'envahisseur italien, puis en assurant nourriture, logis, soins et travail aux réfugiés d'Asie Mineure.
De 1931 à 1948, il fut archevêque de l'Église grecque d'Amérique : il la pacifia et l'organisa, établit de bonnes relations avec les présidents Roosevelt et Truman, acheva son apprentissage de l'universel. Élu patriarche de Constantinople, il se trouva bientôt dans la situation la plus précaire, la crise de Chypre exaspérant le nationalisme turc contre les Grecs orthodoxes d'Istanbul. Sa grandeur fut de transformer cette faiblesse historique en service désintéressé de l'unité chrétienne et de l'unité orthodoxe. Tout en favorisant l'entrée de presque toutes les Églises orthodoxes — et notamment de l'Église russe — dans le Conseil œcuménique, où elles se mirent à collaborer avec les dénominations protestantes, il s'attacha surtout à transformer les relations, si longtemps marquées par la méfiance et le mépris, entre le catholicisme et l'orthodoxie. En janvier 1964, il rencontra le pape Paul VI à Jérusalem. Ces retrouvailles furent libératrices : en décembre 1965, les anathèmes de 1054, symboles de la séparation entre Orient et Occident chrétiens, sont levés ; un « dialogue de la charité » s'engage entre Rome et Constantinople pour préparer, dans l'esprit de l'Église indivise, un dialogue sur le fond ; en juillet 1967, par un geste réparateur, Paul VI se rend à Istanbul ; à l'automne de la même année, Athénagoras entreprend un véritable pèlerinage de l'unité, dans les Balkans, puis à Rome, Genève et Londres-Cantorbéry. Une ère nouvelle commence, selon lui, grâce à laquelle le rapprochement de l'Orient et de l'Occident chrétiens permettra un renouveau décisif du christianisme.
Simultanément, le patriarche parvient, par l'exercice d'une primauté conçue comme service sacrificiel, à rassembler les Églises orthodoxes tentées depuis un siècle par le nationalisme religieux. Il réunit cinq conférences panorthodoxes (à Rhodes en 1961, 1963 et 1964 ; à Belgrade en 1966 ; à Chambéry-Genève en 1968) et met en route un processus préconciliaire.
Dans ses messages, enfin, et en de longs entretiens que rapporte Olivier Clément (Dialogues avec le patriarche Athénagoras), le patriarche expose, pour l'homme d'aujourd'hui, une spiritualité évangélique : il met l'accent sur le christianisme comme inspiration créatrice, sur le lien du mystère et de la liberté, sur le miracle des êtres et des choses, et d'abord des visages, sur la transfiguration de la vie quotidienne par l'absence-présence de l'Inconnu devenu l'Ami secret, qui, par sa résurrection, aimante toute l'histoire et tout l'univers.
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Écrit par
- Olivier CLÉMENT : agrégé de l'Université, professeur à l'Institut Saint-Serge de Paris
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