ATHÉROSCLÉROSE
Mécanismes de l'athérosclérose
Formation des plaques
La formation des plaques se déroule sur plusieurs décennies. Dans les artères coronaires, par exemple, d'authentiques plaques ne s'observent guère avant l'âge de 20-25 ans. Elles s'y forment suivant une succession de remaniements de l'intima artérielle qui débutent dès l'enfance. Bien que beaucoup d'éléments en soient encore incertains, on peut proposer le scénario suivant.
À la naissance existent des épaississements fibreux et musculaires de l'intima formés durant la vie fœtale en certains points « sensibles » du réseau artériel, sans doute pour renforcer la résistance de l'artère aux contraintes imprimées localement par l'écoulement du sang. Sur ces structures normales, existant chez tout individu, s'opère une transformation progressive marquée par : le dépôt de lipides, où prédomine le cholestérol, aboutissant à l' athérome ; et le renforcement du compartiment fibreux, aboutissant à la sclérose. L'accumulation de lipides se fait d'abord au sein de cellules spumeuses (cellules musculaires présentes sur place et monocytes recrutés dans le sang circulant). À partir d'un certain degré le dépôt devient visible à l'œil nu sous forme de stries et de ponctuations jaunâtres, dites graisseuses, existant en un point ou un autre du réseau artériel chez la quasi-totalité des adolescents. Le destin de ces anodines stries et ponctuations graisseuses n'est pas encore cerné avec certitude. Selon toute vraisemblance, une partie d'entre elles vont se stabiliser ou même régresser, alors que d'autres vont continuer de progresser : accroissement du dépôt lipidique qui devient extracellulaire et développement de la sclérose, qui en une dizaine d'années aboutissent à la plaque simple, avec son cœur lipidique et sa chape fibreuse caractéristiques.
Diverses théories ont été proposées pour rendre compte de cette suite plausible d'événements dans l'intima artérielle. Une majorité de spécialistes s'accordent aujourd'hui autour d'une hypothèse globale que le pathologiste allemand Rudolf Virchow avait émise au milieu du xixe siècle : la théorie de l'inflammation.
L'inflammation est la réaction d'un tissu vivant à une agression. Son objectif est la réparation. L'inflammation aiguë s'installe rapidement après un traumatisme, comme un coup ou une plaie : gonflement plus ou moins prononcé, assorti d'une rougeur, d'une augmentation de la chaleur locale et de douleurs. La réaction s'atténue ensuite, à mesure que la réparation se fait. L'inflammation chronique survient quand le traumatisme persiste ou se répète. Une telle inflammation chronique, sujette à des poussées aiguës rythmées par l'intensité de l'agression responsable, est celle qu'on suspecte d'orchestrer la formation de la plaque athéroscléreuse. Les phénomènes qui entrent en jeu sont multiples et complexes, impliquant essentiellement les trois catégories de cellules présentes dans l'intima malade : cellules musculaires, monocytes, lymphocytes T. Si la sclérose est un trait constant de toute inflammation chronique, le dépôt lipidique y est par contre moins commun. Parmi les hypothèses qui ont tenté de l'expliquer dans l'athérosclérose, la plus vraisemblable aujourd'hui est l'oxydation : l'inflammation est génératrice de petites molécules contenant de l'oxygène activé (radicaux libres), capables d'oxyder les molécules avoisinantes ; l'oxydation des complexes lipidiques présents dans l'intima artérielle (lipoprotéines porteuses de cholestérol venues du sang) perturbe leur destin métabolique, aboutissant à leur dépôt dans les cellules (transformation spumeuse) puis, passé un certain seuil, à l'extérieur des cellules[...]
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Écrit par
- Loïc CAPRON : professeur à l'université de Paris-VI, chef du département de médecine interne à l'hôpital européen Georges-Pompidou, Paris
Classification
Média
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