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ATONALITÉ

Le dodécaphonisme, la série de douze sons

Les séries dodécaphoniques (1) - crédits : Encyclopædia Universalis France

Les séries dodécaphoniques (1)

L'idée à laquelle eut recours Schönberg dans la valse de ses Cinq Pièces pour piano op. 23 est celle qui consiste à utiliser, toujours dans le même ordre, sans omission ni répétition, chacune des douze notes de la gamme chromatique. Ce procédé excluait toute référence à une tonalité privilégiée (l'œuvre entière ne pouvait pas être plus tonale que ne l'est une gamme chromatique), garantissait une rigueur de construction que la répétition des mêmes intervalles rendait perceptible à l'auditeur et, enfin, respectait le principe de la polyphonie occidentale selon lequel est recherchée une synthèse entre mélodie et harmonie puisque lesdits intervalles sont appliqués aussi bien aux notes entendues consécutivement qu'à celles qui sont entendues simultanément. Tout naturellement, une musique ainsi construite à partir de l'utilisation systématique des douze sons de la gamme chromatique fut appelée musique dodécaphonique. Mais, au-delà de l'aspect strictement atonal – aspect qui était garanti par le dodécaphonisme – apparaissait un phénomène plus important : celui du remplacement, pour obtenir la cohérence du discours musical, des rapports entre les sons qui résultaient des fonctions tonales par ceux qui s'imposaient naturellement du fait de leur répétition dans le même ordre ou dans un ordre voisin. La structure de la composition musicale était donc obtenue à partir d'une série de douze sons ou des douze intervalles qui les séparent (le dernier étant lié au premier). D'où le nom de musique sérielle donné à cette technique. Pendant une première époque, l'idée de série fut intimement liée à celle de dodécaphonisme en ce sens que l'on ne concevait guère une série qui n'eût pas douze sons, c'est-à-dire tous ceux de la gamme chromatique. On admettait alors qu'une série de douze sons pouvait avoir quatre formes principales différentes : une forme dite originale ; une forme récurrente, dans laquelle l'ordre des notes était inversé, la dernière devenant la première ; une forme renversée, dans laquelle les intervalles étant conservés, leur sens était inversé, chaque intervalle ascendant devenant descendant et inversement ; la récurrence du renversement, où le sens des intervalles et l'ordre des notes étaient inversés. Chaque compositeur se trouvait libre d'utiliser ou non chacune de ces formes de la série ainsi que chacune de leurs transpositions. Le premier, Webern eut cependant l'idée d'utiliser des séries de douze sons qui, en réalité, pouvaient elles-mêmes se subdiviser en trois séries de quatre sons ou quatre séries de trois sons. La notion stricte de série – présentation dans un ordre donné d'un nombre donné d'intervalles – pouvait donc se trouver dissociée de la notion stricte de dodécaphonisme – utilisation systématique des douze sons chromatiques.

Les séries dodécaphoniques (2)

Les séries dodécaphoniques (2)

La série verticalisée

La série verticalisée

Schönberg

Schönberg

Webern

Webern

Jusqu'au début des années 1950, la notion de série parut très étroitement liée à la répartition des notes ou des intervalles. Mais, en 1949 et 1950, Messiaen composa Quatre Études de rythme, pour piano ; dans la deuxième de ces études, intitulée Mode de valeurs et d'intensités, l'ordre de succession sans omission ni répétition était imposé non seulement aux notes, mais aussi à leurs durées et à leurs intensités (nuances). À la suite de cette œuvre apparut la série dite généralisée, illustrée par Boulez dans son Premier Livre de Structures pour deux pianos (1951-1952). Brièvement décrite, la technique sérielle généralisée, ou sérialisme intégral, se présente comme une extension de la technique sérielle de Schönberg – ne concernant que les hauteurs – à tous les autres paramètres du son : durées, intensités et également timbres. Autrement dit, il s'agit de la superposition de séries dictant[...]

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Écrit par

  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)
  • : professeur de composition au Conservatoire national supérieur de musique de Paris

Classification

Médias

Cadences parfaites : exemples en ut majeur - crédits : Encyclopædia Universalis France

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Liszt : Accord final de «Nuages gris» - crédits : Encyclopædia Universalis France

Liszt : Accord final de «Nuages gris»

Autres références

  • BASSE, musique

    • Écrit par
    • 3 508 mots
    • 1 média
    C'est avec les premières recherches de la musique atonale que cette fonction commence à lui être délibérément contestée, pour en arriver à perdre toute raison d'être, au sein du système dodécaphonique mis au point par Schönberg après la guerre de 1914-1918 et poussé jusqu'à ses dernières conséquences...
  • BRIDGE FRANK (1879-1941)

    • Écrit par
    • 940 mots

    Chambriste et chef d'orchestre remarquables, Frank Bridge est aussi le plus grand et le plus important compositeur britannique de musique de chambre.

    Frank Bridge naît le 26 février 1879 à Brighton (Sussex). Son père, professeur de violon, encourage ses dons précoces pour la musique. À partir...

  • CHROMATISME, musique

    • Écrit par
    • 929 mots

    En musique, le terme « chromatisme » recouvre deux acceptions. La plus simple indique l'altération d'un demi-ton – vers le grave ou vers l'aigu – d'un degré diatonique ; dans ce cas, le chromatisme implique l'adoption d'une échelle de référence, l'échelle heptatonique naturelle, dernier stade du diatonisme....

  • FOUILLAUD PATRICE (1949- )

    • Écrit par
    • 844 mots

    Prix des jeunes compositeurs de la S.A.C.E.M. en 1985, le Français Patrice Fouillaud, né le 28 mars 1949 à Limoges, étudie la flûte au Conservatoire de sa ville natale, puis se perfectionne en composition à l'Accademia musicale Chigiana de Sienne (1979), auprès de Franco Donatoni, puis...

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