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BERTOLUCCI ATTILIO (1911-2000)

Attilio Bertolucci - crédits : Leonardo Cendamo/ Getty Images

Attilio Bertolucci

Né à San Lazzaro, près de Parme, trois ans avant la Première Guerre mondiale, Attilio Bertolucci appartient à une génération de poètes qui compte d'autres grandes figures : Giorgio Caproni, Vittorio Sereni, Mario Luzi, et qui dessine, malgré les convulsions du xxe siècle, un possible âge d'or pour la poésie italienne.

« Fils de moyenne bourgeoisie agraire », comme il se définissait lui-même, Bertolucci restera lié au mythe modeste et sensuel de sa ville natale, Parme, la « petite capitale d'autrefois » chère aux écrivains français (Stendhal, Proust, Madame de Staël). Propriétaire terrien et jeune homme attentif à la culture étrangère, en particulier la littérature anglaise, Bertolucci devient l'élève, à Bologne, de l'historien d'art Roberto Longhi : cet enseignement, né de la quête anxieuse des formes et des secrets du visible, enrichit la sensibilité la plus profonde du poète, tournée vers un monde agraire et provincial menacé, vers un impossible chant virgilien, vers un réel somptueux et fragile où l'émotion, à sa pointe extrême, se fait angoisse du néant.

Après avoir lui-même enseigné l'histoire de l'art, et publié dès l'âge de dix-huit ans sa première plaquette de vers, Sirius, que suivra en 1934 Feux en novembre salué par Montale, Bertolucci gagne Rome au début des années 1950 avec sa femme Ninetta et ses deux fils, les futurs cinéastes Bernardo et Giuseppe. Naissent alors des liens très forts avec Pier Paolo Pasolini et Giorgio Bassani. La splendeur calcinée de Rome, sa « vitalité désespérée » (Pasolini) représentent à la fois une joie et un tourment pour le poète. En 1951 paraît son premier recueil d'importance, La Chaumière indienne, dont la seconde édition, augmentée, date de 1955. Suit un silence poétique de seize années, rompu par Voyage d'hiver (1971), sans doute le chef-d'œuvre de Bertolucci, en dépit du prestige de son « roman familial en vers » La Chambre où se nouent poésie et narration comme dans le lointain modèle constitué par Eugène Onéguine. La première partie sera publiée en 1984, la seconde quatre ans plus tard.

Qu'il célèbre le monde dans des vers qu'on peut qualifier de « païens » en dépit du christianisme qu'il revendique, ou qu'il oscille au bord des abîmes de l'âme, Attilio Bertolucci a créé une œuvre reconnaissable entre toutes, mélange troublant et raffiné d'angoisse et de sérénité, de beauté sonore et de références visuelles, de langueur pudique et de vertiges contrôlés. À l'instar d'autres poètes italiens – Umberto Saba, Sandro Penna, voire Carlo Betocchi – d'abord négligés puis reconnus comme essentiels, il laisse une empreinte d'autant plus profonde que son œuvre se montre réticente à l'égard des grands thèmes de l'histoire collective : « Il y a peu de poètes du xxe siècle, a écrit Pier Vincenzo Mengaldo, chez qui l'on trouve une opposition aussi radicale, orgueilleuse et tenace, entre l'histoire personnelle et l'Histoire : ce qui suffirait à garantir la totale modernité de la position de Bertolucci, apparemment si retranchée. »

Passionné de cinéma dès les années 1930, remarquable traducteur (en prose) des Fleurs du mal, Attilio Bertolucci fut un homme de vaste culture, comme le prouvent ses deux volumes de proses, le premier au titre caractéristique, Arythmies, et le second paru quelques jours avant sa mort, J'ai volé deux vers à Baudelaire. Unissant poèmes de jeunesse et compositions tardives, il publia encore deux minces et précieux recueils, Vers les sources du Cinghio en 1993 et Le Lézard de Casarola (lieu proche de Parme où subsiste la maison familiale) en 1997. Sa correspondance avec Vittorio Sereni, Une longue amitié (1994), est une des plus subtiles qu'ait engendrées la littérature italienne.[...]

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Écrit par

  • : écrivain, traducteur, directeur de collection et critique littéraire

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Attilio Bertolucci - crédits : Leonardo Cendamo/ Getty Images

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