AUGUST SANDER. PERSÉCUTÉS / PERSÉCUTEURS, DES HOMMES DU XXe SIÈCLE (exposition)
En circonscrivant l’exposition August Sander. Persécutés / persécuteurs, des Hommes du xxe siècle (8 mars-15 novembre 2018) aux victimes et aux acteurs des persécutions nazies, le Mémorial de la Shoah apporte un éclairage inédit à la production photographique d’August Sander et de son fils Erich au cours du Troisième Reich. La scénographie qui s’ouvre sur une présentation historique de la présence juive à Cologne, du ive siècle aux derniers convois de déportation du printemps 1945, maintient le fil rouge de l’existence de la famille du photographe, de son ancrage social et politique dans la ville.
Le portrait d’une époque
Quand Adolf Hitler accède au pouvoir, le 30 janvier 1933, August Sander réside depuis vingt-trois ans dans le quartier de Lindenthal à Cologne, non loin de sa petite ville natale de Herdorf. Son travail de portraitiste, ses photographies de paysages de la région environnante confortent une notoriété établie dès le début de sa carrière dans la ville autrichienne de Linz. Le tirage réalisé en 1990 par son petit-fils Gerhard Sander le montre au cours de la période heureuse des années 1910, entouré d’Anna Seitenmacher, sa femme, et de ses trois enfants, Erich, Gunther et Sigrid. August Sander devient un familier du groupe marxiste des Artistes progressistes de Cologne. Les portraits qu’il réalise de quelques-uns de ses membres surplombent la vitrine où leur revue A bis Z, relais des courants d’avant-gardes qui stimulent l’Europe de l’entre-deux-guerres, côtoie le catalogue de l’exposition EntarteteKunstorganisée en 1937 par le ministère de la Culture pour stigmatiser « l’art dégénéré » de ces mêmes novateurs. Les échanges fructueux entretenus avec Franz Wilhelm Seiwert et Heinrich Hoerle encourageront Sander dans son projet monumental des Hommes du xxe siècle, portrait de la société allemande de son temps.
L’exposition, organisée avec le concours de la Fondation August Sander et le NS-Dokumentationszentrum de Cologne, présente quelques photographies extraites d’Antlitz der Zeit (Visage d’une époque), ouvrage-essai édité en 1929 et interdit par les nazis en 1936. Après avoir saisi et détruit une grande partie des plaques archivées, les autorités contraignent le photographe à mettre un terme à l’élaboration d’une collection de visages trop souvent éloignés de l’idéal aryen. Sander privilégie alors l’étude topographique des différentes régions d’Allemagne, un travail entrepris dès 1933.
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Écrit par
- Hervé LE GOFF : professeur d'histoire de la photographie, critique
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