AUSTRASIE, LE ROYAUME MÉROVINGIEN OUBLIÉ (exposition)
Armes et bijoux
L’exposition bénéficie donc des résultats récents de l’archéologie préventive, aussi bien dans le domaine funéraire que dans celui des habitats. À la périphérie de Saint-Dizier, à peu de distance des trois tombes déjà mentionnées, plusieurs autres tombes furent installées à la même époque dans les ruines d’une grande villa gallo-romaine, tandis qu’un nouveau village poursuivait l’occupation du lieu. Si les maisons mérovingiennes étaient pratiquement inconnues il y a un demi-siècle, leurs découvertes se sont multipliées ces dernières années, comme le montrent ici celles de Prény en Lorraine, où un important village et sa nécropole ont été fouillés lors de la construction de la ligne de train à grande vitesse vers l’est, ce qui permet à l’exposition d’illustrer, sous forme de plans, coupes et maquettes, ce qu’étaient ces habitats.
De fait, l’exposition propose, avec bonheur et pédagogie, la mise en valeur de très beaux objets (armes et parures), mais aussi de panneaux explicatifs, de cartes, de vidéos et de consoles interactives, particulièrement à l’intention des jeunes publics. Mais, au-delà des bijoux spectaculaires typiques de l’art mérovingien – lesquels, hélas pour l’archéologie, ne seront plus déposés dans les tombes une fois la christianisation achevée, peu avant la fin du millénaire –, l’exposition et son catalogue apportent deux grandes leçons historiques. D’abord, ils permettent de battre en brèche le mythe des « invasions barbares », comme le fait de manière convaincante, depuis plusieurs années, l’historien Bruno Dumézil, qui est partie prenante de l’exposition. En effet, l’archéologie n’observe nullement de destructions généralisées à ces périodes, et la continuité des occupations est la plupart du temps la règle, même si la dimension des villes s’amenuise. La seconde leçon, explicite, est qu’on ne saurait distinguer par leurs tombes « Romains » et « Barbares », et encore moins, parmi ces derniers, les différentes ethnies dont nous parlent les récits de l’époque. Les identités ethniques ne cessaient de se modifier et de se métisser continûment, un fait qui n’est pas sans enseignements pour des époques plus récentes.
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Écrit par
- Jean-Paul DEMOULE : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France
Classification
Média