BRUNDAGE AVERY (1887-1975)
L'Américain Avery Brundage fut président du Comité international olympique (C.I.O.) de 1952 à 1972. À ce poste, il fit preuve d'une autorité et d'une intransigeance absolues, ce qui fit de lui un personnage controversé. Contre vents et marées, il voulut maintenir dans toute sa pureté l'idéal olympique tel que l'avait défini au xixe siècle le baron Pierre de Coubertin. Il resta ainsi sourd aux soubresauts et aux mutations du xxe siècle : il fut un farouche adversaire du gigantisme des Jeux, de leur commercialisation et de leur politisation. Pourtant, pendant son mandat à la tête du C.I.O., Brundage aura vu, à son grand regret, les Jeux devenir une vaste entreprise commerciale, conséquence notamment de la médiatisation accrue provoquée par leur retransmission télévisée.
Avery Brundage voit le jour le 28 septembre 1887 à Detroit, dans une famille modeste. Athlète complet, il participe aux jeux Olympiques de Stockholm en 1912, où il dispute le pentathlon et le décathlon, terminant, respectivement, seizième et sixième de ces deux épreuves. Il est ensuite sacré champion des États-Unis de all-around (sorte de décathlon qui se déroule sur une seule journée) à trois reprises, en 1914, 1916 et 1918. Parallèlement, cet ingénieur diplômé de l'université de l'Illinois fonde sa propre société de construction de gratte-ciel à Chicago, qui le rendra multimillionnaire.
Son intérêt pour le sport amateur ne s'estompera cependant jamais. Brundage assure pendant sept ans (1928-1933, 1935) la présidence de l'Amateur Athletic Union. Élu à la tête du Comité olympique américain en 1929, il présidera cet organisme jusqu'en 1953. Cette entrée dans le mouvement olympique lui ouvre les portes du C.I.O., dont il devient membre en 1936. Vice-président du C.I.O. de 1945 à 1952, il accède à sa présidence en 1952.
Fermement convaincu de la nécessité de préserver dans toute sa pureté l'amateurisme de la compétition olympique, Brundage menace de sanctions les sportifs qui commettent des infractions, même mineures, aux règles strictes qu'il instaure, interdisant à certains d'entre eux de participer aux Jeux pour « professionnalisme ». Ainsi, en 1972, il obtient, pour ce motif, que le skieur autrichien Karl Schranz soit exclu des Jeux d'hiver de Sapporo.
Par ailleurs, sa position concernant les événements politiques majeurs, qu'il choisit de dissocier totalement de la compétition olympique, l'amène à prendre plusieurs décisions qui font parfois scandale. Déjà, en 1935, il s'était opposé à l'idée de boycottage par les États-Unis des Jeux de 1936 organisés à Berlin par le régime nazi. Celle-ci avait été initiée, notamment, par le représentant américain au C.I.O., Ernest Lee Jahncke. Ce dernier sera exclu du C.I.O. en 1936 et... remplacé par Brundage. Bien plus tard, en 1968, Brundage refuse de condamner la répression sanglante par les militaires mexicains des manifestations étudiantes sur la place des Trois-Cultures, avant l'ouverture des Jeux de Mexico. Puis, durant ces Jeux, il critique avec véhémence l'attitude des athlètes noirs américains, qui protestent sur les podiums contre la discrimination raciale qui sévit dans leur pays. En 1972, il se déclare favorable à ce que la Rhodésie, malgré sa politique d'apartheid, soit autorisée à participer aux Jeux de Munich – il est néanmoins désavoué par l'assemblée générale du C.I.O. Lorsque, pendant ces XVIIes Jeux d'été, onze sportifs israéliens sont assassinés par des terroristes palestiniens, il insiste, malgré de lourdes critiques, pour que les épreuves continuent : « The Games Must Go on », déclare-t-il dans un discours au Stade olympique. Il prend cette grave décision alors que son successeur, lord Killanin, a déjà été élu.
Avery Brundage s'éteint le 8 mai 1975 à Garmisch-Partenkirchen,[...]
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