AXIOMATIQUE
Axiomatisation des phénomènes physiques
On remarquera qu'il y a un lien essentiel entre axiomatisation et formalisation. Ce lien nous éclaire sur la nature profonde de la science qui d'une certaine manière tourne le dos à l'empirique pour constituer des systèmes cohérents de concepts et de relations. La coupure épistémologique entre le pur empirisme et la science passe toujours par l'invention d'un « jeu » formel.
L'utilité de la méthode axiomatique est d'abord de fournir un cadre adapté au traitement mathématique de nombreuses situations. Ainsi, lorsque A. Kolmogorov a formalisé, en 1933, les fondements du calcul des probabilités, il a permis à cette science de se dégager des notions vagues et subjectives de hasard et de chance ; l'étude des probabilités, restée longtemps stagnante, a pris ainsi un nouvel essor, devenant une partie très vivante des mathématiques.
Le champ d'application de la méthode axiomatique ne se limite pas, on vient de le voir, aux mathématiques pures. De manière générale, l'axiomatisation d'une théorie physique comporte deux étapes. D'une part, on élabore une théorie mathématique portant sur des symboles abstraits, et, d'autre part, divers « axiomes de correspondance » précisent comment les phénomènes observables se traduisent au moyen de signes. Dans l'exemple, très simple, de l' optique géométrique, la théorie mathématique utilisée est la géométrie élémentaire ; des axiomes de correspondance indiquent dans quels cas certains phénomènes lumineux doivent être symbolisés par des rayons (c'est-à-dire des droites orientées), des miroirs par des surfaces, etc. ; de plus, on décrit les constructions géométriques qui symbolisent, par exemple, les phénomènes de réflexion ou de réfraction. Dans la théorie cinétique des gaz, la théorie mathématique utilisée est relative au comportement statistique d'un grand nombre de « molécules » ; les axiomes de correspondance indiquent qu'un gaz, phénomène observable, doit être symbolisé par un grand nombre de molécules en mouvement, que la température se traduit par la vitesse quadratique moyenne, la pression par la moyenne de l'impulsion (choc) sur les parois...
Dès qu'un phénomène physique est « mis en équation » grâce aux axiomes de correspondance, son étude se poursuit ensuite par voie purement déductive, sans recours nouveau à l'expérimentation. La confrontation a posteriori des résultats démontrés, c'est-à-dire obtenus comme des théorèmes, et de leur interprétation observable n'a pour but que de juger si le choix des axiomes de correspondance est satisfaisant.
Les phénomènes physiques ne sont cependant pas le seul domaine où s'applique la méthode axiomatique, puisqu'au contraire son champ d'application s'étend peu à peu à toutes les branches scientifiques.
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Écrit par
- Georges GLAESER : professeur à la faculté des sciences de Strasbourg
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