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AZIYADÉ, Pierre Loti Fiche de lecture

Le 20 janvier 1879 paraît, à la librairie Calmann-Lévy, un petit livre sans nom d'auteur, Aziyadé ; la couverture mauve est ornée d'un portrait de femme orientale. L'accueil de la critique est mince, et celui du public réservé. Pourtant, ce titre est celui qui vient à l'esprit lorsque l'on pense à Pierre Loti. Et c'est encore Aziyadé qui, un siècle plus tard, marque le début du « retour » à Loti, par la grâce d'une préface signée Roland Barthes (1971), le critique qui, en ces années-là, incarne l'esprit moderne.

<em>Portrait de Monsieur X</em><em> (Pierre Loti)</em>, H. Rousseau - crédits : Photo Josse/ Leemage/ Corbis historical/ Getty Images

Portrait de Monsieur X (Pierre Loti), H. Rousseau

Aziyadé, qui signe l'entrée de Pierre Loti en littérature, est né presque par hasard. L'auteur, de son vrai nom Julien Viaud (1850-1923), officier de marine, tient depuis l'adolescence un journal intime et entretient une abondante correspondance avec sa famille et ses amis. Au retour d'une campagne en Grèce (Salonique) et en Turquie (Constantinople), il lit, à Toulon, des pages de son journal à quelques amis officiers qui l'encouragent à les publier sous forme de roman. Ils se chargent même de lui trouver un éditeur et d'effectuer les corrections que celui-ci exige. L'un d'eux, Lucien Jousselin (le Plumkett du roman) signera le contrat pour « M. Julien Viaud, actuellement en voyage ». Le livre paraît sans nom d'auteur, puisque celui-ci, officier de marine, n'a pas le droit de publier d'œuvre romanesque.

À peine un roman

À Salonique, l'aspirant Julien Viaud est tombé amoureux d'une esclave circassienne, Hatidjé, qu'il retrouve plus tard à Constantinople. Lors de sa longue escale dans cette ville, l'officier passe à terre le plus clair de son temps. Il s'installe dans les vieux quartiers et se déguise en Turc. Lorsqu'elle peut échapper à son harem, Hatidjé vient le retrouver. Des serviteurs dévoués (Daniel, ensuite Memet) facilitent les rencontres des deux amants. Puis l'escadre rentre en France. Julien doit quitter Hatidjé.

Aziyadé conserve l'essentiel du texte du journal où Julien a noté cette aventure, en même temps que ses observations sur la ville, les gens, le climat, et que ses réflexions sur l'évolution de l'empire ottoman en cette période troublée. Du journal, il conserve aussi l'allure fragmentée : chapitres de longueur très inégale, insertion de lettres, changements constants de sujets (la politique, la langue, les costumes, les flâneries dans la ville, etc.), du plus grave au plus saugrenu.

L'écrivain se contente de diviser la matière du journal en cinq parties, et de changer les noms – à part le sien, puisque « Loti » est le surnom qu'il a rapporté de Tahiti en 1872 et qu'il adoptera en 1881 comme nom d'auteur. L'escadre devient britannique, déguisement qui ne résiste guère à une lecture un peu attentive. Surtout, il fait mourir Aziyadé de chagrin, et Loti dans les combats où, sous le nom d'Arif-Ussam-Effendi, il défend sa patrie d'adoption. Le déclin de l'empire ottoman sert ainsi de toile de fond à l'impossible amour de l'officier britannique et de la belle esclave.

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<em>Portrait de Monsieur X</em><em> (Pierre Loti)</em>, H. Rousseau - crédits : Photo Josse/ Leemage/ Corbis historical/ Getty Images

Portrait de Monsieur X (Pierre Loti), H. Rousseau

Autres références

  • LOTI PIERRE (1850-1923)

    • Écrit par
    • 1 735 mots
    ...il rapporte de ses voyages des pages du Journal intime (il tient celui-ci depuis l'adolescence), qui vont donner naissance à son premier livre, Aziyadé, un peu par hasard, sur l'insistance de ses amis,– puis à la plupart de ses livres. À son retour de Turquie (Salonique et Constantinople, 1876-1877),...
  • PIERRE LOTI, CENT ANS APRÈS

    • Écrit par
    • 1 355 mots

    Pierre  Loti, Julien Viaud pour l’état civil, est mort à soixante-treize ans, le 10 juin 1923. L’officier de marine (quarante-deux ans de service) et l’auteur à succès (pilier des éditions Calmann-Lévy et académicien français) reçurent les honneurs de funérailles nationales. Dans un pamphlet, André...