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AZTÈQUES

L'organisation sociale

Une telle ville était le reflet d'une organisation sociale déjà très poussée, fort différente de ce qu'elle avait été au temps des migrations de la petite tribu. Alors, l' autorité semble avoir été exercée par les prêtres de Huitzilopochtli, qui, peut-être avec l'aide des chefs de famille, guidaient la migration. Deux cents ans plus tard, les Espagnols trouvèrent en face d'eux un empire hautement structuré, une sorte de « bureaucratie » déjà puissante, une forte organisation sociale. Ils traduisirent par « empire » ce qui n'était en fait qu'une sorte de confédération de tribus sous la férule des Aztèques, et par « empereur » le mot tlatoani, « celui qui a la parole ». Le tlatoani n'était pas un chef héréditaire, il était élu, ou plus exactement choisi à l'intérieur d'une même famille, comme étant le plus digne d'exercer le pouvoir. Les querelles de succession, au sein des familles princières, prouvent que la notion de pouvoir héréditaire était en voie de stabilisation. Toute l'organisation sociale, d'ailleurs, subissait des transformations. Au-dessous de l'empereur, les tecuchtli, les seigneurs et les prêtres, seules classes sociales dispensées de l'impôt. Le clergé, très nombreux et de plus en plus puissant, avait à sa tête les prêtres des deux temples jumeaux de Huitzilopochtli, dieu tribal des Aztèques, dieu de leur vocation guerrière, et de Tlaloc, le vieux dieu de la Pluie des agriculteurs sédentaires. Les tecuchtliacquéraient généralement cette dignité au combat. En effet, la noblesse n'était pas encore héréditaire et seuls les mérites permettaient d'accéder aux honneurs. Dans un peuple si profondément attaché à une mystique guerrière, il est normal que le courage ait représenté la source des dignités. Tout guerrier ayant fait quatre prisonniers était couvert d'honneurs et de biens. Celui qui ne se distinguait pas au combat était destiné à rester toute sa vie macehualli, « homme du commun ». À la fin de cette période, une évolution se fit sentir : les fils des hommes qui s'étaient distingués furent reconnus dès leur naissance pilli, « princes ».

La plus grande partie de la population était composée des macehualli, les hommes du peuple, redevables de l'impôt, soumis aux corvées. La ville de Mexico-Tenochtitlán se composait de calpulli, sortes de quartiers, ou plutôt d'unités territoriales, héritage probable des anciens clans. En se mariant, chaque homme recevait une parcelle de son calpulli à cultiver.

Certaines catégories sociales jouaient cependant un rôle privilégié, les marchands, pochteca, qui représentent l'une des institutions les plus étonnantes de l'ancien Mexique, et dont l'origine paraît remonter à la plus haute antiquité. Ils sont à la fois des trafiquants, chargés de parcourir l'empire en rapportant des marchandises précieuses – or, plumes de quetzal, coton des terres chaudes, nourritures raffinées pour la cour de l'empereur – mais ils sont aussi des espions, voyageant jusqu'aux limites de l'empire, observant pour le compte de Moctezuma ce qui se passe dans les provinces. Ils sont en outre des agents provocateurs, et leur rôle, à l'arrivée des Espagnols, sera important. En fait, ils représentent l'avant-garde de la conquête militaire aztèque, et une classe sociale dont l'importance va croissant.

Une autre catégorie, celle des artisans, joue un rôle privilégié. Nous avons vu les Aztèques se réclamer d'une filiation toltèque, ce peuple civilisateur par excellence qui les avait précédés et qui, disait-on, sous la conduite de son roi-prêtre Quetzalcóatl, avait inventé les arts et les techniques. On donnait aux artisans d'art, orfèvres, tisserands, plumassiers, etc. le nom de tolteca,[...]

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Écrit par

  • : docteure en archéologie à l'université Paris I-Panthéon Sorbonne, chercheuse associée Universidad de Guadalajara (Mexique)
  • : docteure en archéologie des Amériques, chercheuse associée au laboratoire Archéologie des Amériques - UMR 8096 - CNRS
  • : assistante au musée de l'Homme

Classification

Médias

1300 à 1400. Tamerlan - crédits : Encyclopædia Universalis France

1300 à 1400. Tamerlan

Civilisations précolombiennes, Méso-Amérique - crédits : Encyclopædia Universalis France

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Tripode, Teotihuacán - crédits : AKG-images

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