BACTÉRIOPHAGES ou PHAGES
Morphologie et structure
Depuis les surprenantes images de bactériophages « en forme de têtards » observées au microscope électronique par les premiers expérimentateurs (Ruska, en 1941 ; Luria, Delbruck et Anderson, en 1942), le développement considérable des recherches sur la structure des bactériophages a conduit à la description de nombreuses variétés morphologiques et à l'élaboration d'une véritable anatomie ultrastructurale de ces virus. Plusieurs milliers de bactériophages ont été examinés au microscope électronique et ils ont été classés en différents morphotypes suivant la forme et les dimensions de la tête, la structure de la queue, l'existence ou l'absence d'un manchon caudal contractile, la structure (rudimentaire ou complexe) de la plaque terminale, les dimensions globales du virion, la nature de l'acide nucléique (ADN bicaténaire, ADN monocaténaire, ARN), etc.
Les bactériophages les plus anciennement décrits, ceux dont la structure a été la plus étudiée, sont constitués schématiquement d'une coque protéinique ou capside (enveloppant et protégeant la molécule centrale d'acide nucléique), et d'un appareil spécialisé à structure complexe (la queue) par lequel le phage se fixe sur la bactérie sensible pour y injecter son acide nucléique. Mais tous les bactériophages ne répondent pas à ce modèle classique et on peut actuellement les réunir en quatre grands groupes morphologiques : les phages à ADN bicaténaire, avec queue ; les phages sans queue, à symétrie cubique et à ADN monocaténaire ; les phages à ARN ; les phages filamenteux à ADN monocaténaire. On a également décrit des bactériophages isométriques (à ADN) contenant 12 à 14 p. 100 de lipides sous forme d'une double couche située entre les coques externe et interne de la capside virale (phage PM2) ; cette couche lipidique, assimilée à l'enveloppe d'un virus nu, est responsable de la sensibilité de ces phages « lipidiques » à l'activité des solvants organiques. Malgré l'importance capitale en virologie générale de la découverte des phages à ARN (polyèdres réguliers d'un diamètre de 15 nm, d'un poids moléculaire de 4 × 106 dont 30 p. 100 d'ARN) et des phages filamenteux (filaments ou bâtonnets de 700 à 800 nm de longueur et de 5 nm d'épaisseur, d'un poids moléculaire de 11,3 × 106 et renfermant 12,2 p. 100 d'ADN monocaténaire), nous décrirons en détail un des phages du premier groupe, le phage T2. D'une longueur totale d'environ 213 nm, ce phage a une tête polyédrique allongée à contour hexagonal (100 sur 80 nm), une queue (113 nm) avec une gaine contractile (sheath) et une plaque terminale. On admet que la tête, longtemps considérée comme ayant la forme d'un prisme hexagonal, bipyramidal, est un icosaèdre particulier qui a subi une élongation dans sa région équatoriale. Contrairement à ce que l'on observe chez d'autres bactériophages de types morphologiques différents, les sous-unités protéiniques (capsomères), dont l'assemblage en mosaïque constitue la capside de la tête du phage T4, n'ont pu être vues jusqu'à présent sur les micrographies électroniques de ce virus, bien que leur existence ne fasse aucun doute et que leur nombre ait pu être évalué à 1 000 unités d'un poids moléculaire de 80 000.
La queue possède un axe central rigide (core) parcouru sur toute sa longueur par un fin canal (diamètre 8 nm). La gaine coaxiale apparaît formée par l'empilement de 24 anneaux espacés de 4 nm, eux-mêmes constitués de 144 unités protéiques, d'un diamètre de 3 nm et ayant une disposition hélicoïdale. Au cours de la fixation du phage sur la bactérie sensible, cette gaine se contracte à volume constant (Brenner et coll., 1959). D'autres travaux consacrés à la cinétique de cette contraction[...]
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Écrit par
- Jean-François VIEU : chef de laboratoire à l'Institut Pasteur
Classification
Média
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