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BAGDAD

La ville contemporaine

Légèrement en amont du confluent du Tigre et de la rivière Diyala, dans l'axe de peuplement dense de la Mésopotamie, Bagdad se situe à mi-chemin des montagnes du Kurdistan et des marais de la basse Mésopotamie, à l'endroit où le Tigre et l'Euphrate se rapprochent. À peu près équidistante des deux autres grandes villes du pays qu'elle domine nettement, Mossoul au nord et Bassorah au sud, la capitale de l'Irak, lieu de convergence des différentes composantes ethniques et religieuses du pays, tient une position centrale dans l'espace national. C'est aussi un carrefour stratégique à l'échelle du Moyen-Orient. De Bagdad, on rejoint, vers le sud-est, le golfe Persique ; vers le nord-est, on accède à Téhéran ; on atteint la Turquie et la mer Noire par la vallée du Tigre, la Syrie et la Méditerranée par celle de l'Euphrate ou par le désert.

Malgré un environnement climatique aride, Bagdad n'est pas une ville du désert, mais une ville du fleuve. À partir de son site initial, les terrasses d'un méandre, la ville s'est étendue sur les basses terres inondables du Tigre. Elle s'étale désormais sur les deux rives du fleuve, qui doit au régime nivo-pluvial de ses affluents de rive gauche des crues importantes et brutales au moment de la fonte des neiges sur les massifs turcs et les sommets iraniens. Si l'on a cherché à pallier les inondations dévastatrices périodiques par la construction de canaux de crue et de levées, c'est à partir de 1955 que le risque est jugulé grâce à des travaux hydrauliques permettant de réguler le débit du fleuve en dérivant les eaux de crue vers le désert. Cela facilite l'essor de la ville qui bénéficie aussi des revenus du pétrole, même si les gisements se trouvent aux extrémités septentrionales et méridionales du pays.

Alors que Bagdad comptait 500 000 habitants en 1950 et deux millions vingt ans plus tard, on peut estimer que c'était, en 1995, une agglomération de près de cinq millions d'habitants et, en 2005, de près de huit. Le dynamisme démographique d'une population jeune ne suffit pas à expliquer une telle croissance, qui tient largement à un solde migratoire positif résultant de plusieurs facteurs : afflux de populations rurales et de travailleurs étrangers comme dans les pays arabes du Golfe ; afflux de réfugiés du nord au moment des guerres kurdes (1961-1975) et de réfugiés du sud pendant la guerre contre l'Iran (1980-1988). Cela s'est traduit par un étalement du bâti aussi bien dans le cadre de quartiers planifiés de petits collectifs, de quartiers spontanés où les néo-citadins construisent des habitations en matériaux traditionnels (brique crue, roseaux), de villes nouvelles, mais aussi de bidonvilles.

Sous Saddam Hussein (1979-2003), Bagdad concentre fonctions de commandement politique et activités tertiaires. Héritière d'une tradition artisanale de qualité (faïence, soierie...), elle abrite la plupart des industries manufacturières du pays. Casernes, aéroports militaires, monuments glorifiant la révolution reflètent le régime qui pratique un urbanisme autoritaire. Les quartiers anciens, où voisinent mosquées et églises, sont éventrés par de grandes artères. Un centre moderne est érigé sur les deux rives du Tigre. Il regroupe les sièges du pouvoir et de la puissance pétrolière, mais aussi les avenues bordées de vitrines de luxe, de restaurants, d'hôtels internationaux. Après la guerre Irak-Iran, la ville a connu une rapide reconstruction et la guerre du Golfe, en 1991, n'a pas laissé de lourdes séquelles sur le paysage urbain. En revanche, depuis l'intervention américaine, en 2003, il est certain qu'on assiste à une fragmentation accrue de la ville, avec un creusement des écarts entre quartiers riches et quartiers pauvres ainsi qu'à la confessionnalisation des[...]

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Écrit par

  • : ancienne élève de l'École normale supérieure, agrégée de géographie, maître de conférences à l'université de Paris-IV-Sorbonne
  • : membre de l'Institut, professeur honoraire au Collège de France

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Médias

Irak : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Irak : carte administrative

Prise de Bagdad par les Mongols - crédits : VISIOARS/ AKG-images

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