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BANQUE Histoire de l'institution bancaire

L'institution bancaire contemporaine

Le succès et la diffusion de l'exemple amstellodamois signent les débuts d'une ère nouvelle de l'histoire bancaire : désormais, les évolutions des structures bancaires vont toutes dans le sens de la triple institutionnalisation évoquée. Du fait de l'extension de la domination coloniale et impériale européenne, cette institutionnalisation bancaire touche toutes les aires géographiques, soit qu'elle s'appuie sur des savoir-faire bancaires déjà fort avancés, comme en Chine, en Inde, au Japon, dans l'Empire ottoman, soit que les migrations et les dominations européennes contribuent au transfert de ces savoir-faire.

Paradoxalement, la seule histoire de résistance à cette institutionnalisation, si l'on excepte le cas particulier des économies socialistes à planification centrale, se confond avec celle du plus grand succès économique des migrations européennes, à savoir les États-Unis d'Amérique. L'histoire bancaire américaine entre la fin de la seconde banque nationale, en 1836, et la création du système de Réserve fédérale en 1913 montre bien la nécessité impérative, et nouvelle, d'un haut niveau d'institutionnalisation bancaire dans une économie développée. Face à ce qui s'apparente à un manque, les acteurs bancaires américains développèrent des institutions spécifiques visant à la fois la régulation du système de paiement, la hiérarchisation des banques et l'organisation d'un système de prêt en dernier ressort. Les deux meilleurs exemples de prêteur en dernier ressort « privé » demeurent la chambre de compensation de New York et le rôle exceptionnel joué par la banque – et le banquier – J.P. Morgan lors de la crise de 1907, laquelle crise emporta finalement la décision de recréer un système de banque centrale.

Mais les cas américain et anglais montrent aussi combien les contraintes pesant sur la capacité des institutions bancaires de premier rang peuvent contribuer aux innovations financières. Ainsi, l'Act of Peel adopté en 1844 et qui divise la Banque d'Angleterre en deux départements relativement autonomes – un pour l'émission des billets, un pour l'escompte et le crédit – peut s'analyser comme un retour de cette Banque au modèle, pourtant antérieur, de la Banque d'Amsterdam. Il eut, comme l'absence de banque centrale aux États-Unis, pour résultat de créer une tension sur le coût ou la disponibilité en moyens de paiements centraux et encouragea l'usage de la monnaie bancaire ou scripturale à un degré très supérieur aux autres pays européens en 1914.

Cette évolution fut accentuée par les deux guerres mondiales, qui aboutirent à la disparition des moyens de paiement à valeur dite « intrinsèque » (pièces d'or et d'argent) et au souci de contrôler l'émission centrale de monnaie fiduciaire, c'est-à-dire de billets de banque. Dès lors, le développement bancaire a pris deux directions principales, parfois combinées, parfois distinguées : un rôle accru dans les systèmes de paiement ; le développement d'un canal de plus en plus large de transformation des ressources monétaires en titres financiers et réciproquement.

La « banque universelle » qui se développe en Europe dans la seconde moitié du xixe siècle sur le modèle de la Société générale de Belgique (1822) représente la combinaison de ces deux fonctions. Elle évolue au cours du xxe siècle selon des alternances de spécialisation et de retour à la « banque à tout faire », d'où l'existence de trois formes typiques, plus ou moins hybridées. La banque universelle combine en général une forte composante de banque de dépôts et une importante activité sur les marchés financiers, mais selon des modalités très variables selon la période et les règles législatives. La banque de particuliers[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences en histoire, Université Paris Ouest Nanterre-La Défense, directeur adjoint du laboratoire Institutions et dynamiques historiques de l'économie (I.D.H.E.)

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