BANQUE MONDIALE
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Du soutien à la croissance à la lutte contre la pauvreté
L’opportunité d’œuvrer au développement des pays pauvres et ainsi d’ouvrir des marchés aux pays riches constituait un double objectif des pays développés représentés à Bretton Woods en 1944. Nombre de ces derniers en Europe ainsi que le Japon avaient par ailleurs des besoins de financements massifs pour assurer leur reconstruction. Toutefois, dans le contexte de l’après-guerre, le manque d’intégration des marchés financiers au plan mondial était un problème, ce qui justifia d’orienter la nouvelle institution vers le seul grand marché financier profond et liquide qui existait : celui des États-Unis. La création de la Banque mondiale, qui porte la marque du célèbre économiste britannique John Maynard Keynes, alors en charge des négociations à Bretton Woods pour le compte du Trésor, rassemble ces considérations.
Dans ses premières années, la BIRD s’oriente beaucoup vers l’Europe, d’abord au bénéfice de la France, des Pays-Bas et du Danemark, ainsi que vers le Japon. Elle est cependant éclipsée par le plan Marshall, dont le déploiement rapide à partir de 1947 assure une partie des besoins financiers des pays européens. En conséquence, la Banque pivote rapidement vers le financement de projets d’infrastructures dans le monde entier, dans des secteurs tels que l’énergie, l’irrigation et les transports. Le premier prêt à un pays non européen est accordé au Chili en 1948, pour un montant de 13,5 millions de dollars en soutien à la production hydroélectrique. À cette époque, la Banque lance également un programme d’assistance technique, qui précéda la fondation, en 1955, de l’Institut de développement économique (IDE) visant à former les fonctionnaires des pays membres. Dès les premières années, l’influence américaine sur les orientations de la Banque est notable.
L’Asie étant prise dans l'engrenage des conflits sociaux et l'Afrique dans le fait colonial, la Banque se cantonne initialement à l'Amérique latine, qui reste longtemps sa principale zone d'action – en même temps qu’une position géographique intéressante pour les États-Unis – avant d’y être supplantée par la Banque interaméricaine de développement à la suite des crises latino-américaines des années 1980. Parallèlement, tout en s'investissant dès le début dans sa mission de lutte contre la pauvreté, la Banque limite le champ de ses interventions aux infrastructures, sans s'intéresser dans le détail à la façon dont ces projets s'intègrent dans l'échelle des priorités des États. C’est progressivement, dans les années 1960 et 1970, en particulier sous la présidence de l’ancien ministre de la Défense de John Kennedy et de Lyndon Johnson, Robert McNamara (1968-1981), que des financements de plus en plus nombreux sont confiés à la nouvelle AID. Cette institution accorde des prêts et des dons à des conditions privilégiées aux pays sous-développés pour construire des routes et des hôpitaux. Le rapport annuel de 1985 confirme la justesse de la nouvelle approche en indiquant que « les bons projets ne suffisent pas pour maintenir la croissance dans un contexte institutionnel et de politique générale inadéquat et que, de même, l'investissement ciblé ne suffit pas pour réduire la pauvreté absolue ». Depuis 1978, le Groupe a le double objectif « d’accélérer la croissance et de réduire la pauvreté ».
Sous la présidence de Robert McNamara, les trois institutions du Groupe montent en puissance dans les pays décolonisés d’Afrique et en Asie et s’y étendent vers de nouveaux domaines, tels que l’eau, le développement rural ou l’éducation. Les actions se font plus concrètes et ciblées et, dès 1971, plus soucieuses de l’environnement. La Banque recrute également à cette période des profils plus variés, tels que des anthropologues, des[...]
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Écrit par
- Olivier MARTY : enseignant en économie européenne à Sciences Po et à l'université de Paris
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