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STROZZI BARBARA (1619-1677)

La chanteuse virtuose et compositrice de musique vocale Barbara Strozzi, également appelée Barbara Valle, est l’une des rares femmes du xviie siècle à avoir publié ses compositions.

Née en 1619, à Venise, elle est la fille adoptive et vraisemblablement l’enfant illégitime du poète Giulio Strozzi ; sa mère, Isabella Garzoni, travaille comme domestique dans la maison de Giulio. Ce dernier va utiliser ses relations dans le monde intellectuel de Venise pour faire reconnaître le talent de sa fille et favoriser sa carrière. Il est membre d’un cercle vénitien, l’Accademia degli Incogniti (Académie des inconnus), qui se réunit pour parler et débattre de littérature, d’éthique, d’esthétique et de religion. Partisans de l’opéra vénitien tel qu’il s’est affirmé avec Monteverdi puis Cavalli au cours du xviie siècle, les Incogniti ne comptent pas parmi eux de musicien professionnel, mais leurs discussions portent parfois sur la musique. En 1637, Giulio crée une section musicale des Incogniti, l’Accademia degli Unisoni (Académie des personnes qui sont à l’unisson, un jeu de mots faisant allusion à la musique), qui comprend plusieurs musiciens ; Barbara Strozzi préside le groupe, où elle se produit comme cantatrice (ce qui lui donne probablement l’occasion d’interpréter ses propres compositions) et suggère des sujets de discussion. Plusieurs publications lui sont dédiées, à commencer par deux volumes de musique composée par Nicolò Fontei, Bizzarriepoetiche(Bizarreries poétiques) de 1635 et 1636, suivis notamment, en 1638, d’un recueil d’informations sur certaines activités du groupe, Le Veglie de’ SignoriUnisoni (Les Veillées des académiciens qui sont à l’unisson). Le rôle de Barbara Strozzi comme hôtesse des Unisoni et son activité notable dans le domaine musical ont fait l’objet d’une satire dans un manuscrit anonyme qui pourrait être dû à l’un des Incogniti ; l’auteur y assimile son statut de musicienne à une conduite licencieuse, sous-entendant qu’elle est une courtisane.

Sans les relations de son père et la place occupée par celui-ci dans la vie artistique de Venise, Barbara Strozzi n’aurait probablement pas pu se lancer dans une carrière de compositrice, ce qu’elle fait en 1644 avec la publication d’un volume de madrigaux, Il primo libro de’ madrigali(Le Premier Livrede madrigaux). Entre cette date et 1664, elle publiera huit recueils de musique, dont l’un (l’opus 4) est aujourd’hui perdu. La préface du deuxième cite Francesco Cavalli, l’un des compositeurs les plus connus et les plus importants sur le plan historique du xviie siècle vénitien, comme son professeur. Bien que Barbara Strozzi soit l’unique héritière de Giulio, sa condition financière ne semble pas s’améliorer après le décès de son père adoptif en 1652. C’est peut-être la raison qui la pousse à publier plusieurs livres selon un rythme rapide, comme si elle cherchait un protecteur régulier. Ses efforts sont apparemment infructueux, et sa situation matérielle reste précaire jusqu’à la fin de sa carrière. Elle meurt le 11 novembre 1677, à Padoue.

Le fait même que Barbara Strozzi a publié huit ouvrages de musique montre que ses œuvres étaient bien accueillies. Après son premier recueil de madrigaux, sa production consiste principalement en arias, cantates et ariettes. Les arias sont généralement de courtes pièces divisées en strophes (chaque stance étant chantée sur le même air), tandis que les cantates sont le plus souvent des compositions plus longues, comprenant plusieurs sections et dans lesquelles la musique change pour s’adapter au sens des paroles. Par exemple, des vers passionnés ou chargés de pathos seront chantés sous la forme de récitatifs, alors qu’on utilisera plutôt des rythmes de danse pour des poèmes plus légers. La poésie mise en musique par Barbara Strozzi tourne essentiellement autour du thème de l’amour, conformément[...]

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Écrit par

  • : professeure de musique, Rutgers university, New Brunswick, New Jersey (États-unis)
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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