SAINT-DENIS BASILIQUE DE
On considère saint Denis comme un évêque missionnaire venu évangéliser la cité des Parisiens. Il y trouva le martyre vers 250, vraisemblablement sur la colline de Montmartre, avant d’être inhumé à l’emplacement de l’actuelle basilique. La Vie de sainte Geneviève, rédigée vers 520, présente Denis comme le premier évêque de Paris, envoyé par le pape Clément I (fin du premier siècle). Les textes mentionnent ensuite ses deux compagnons, le prêtre Éleuthère et le diacre Rustique. Au ve siècle, on attribue à sainte Geneviève l’agrandissement de la basilique qui avait été édifiée à l’emplacement du tombeau du saint. Dès ce moment, de hauts personnages de l’aristocratie franque s’y firent inhumer, telle la reine Arégonde (morte entre 580 et 590). Dagobert (629-639) ordonna à nouveau d’agrandir l’édifice initial et fut le premier roi à choisir d’être inhumé dans la basilique.
Le monastère allait connaître une nouvelle apogée avec les Carolingiens. Charles Martel et Pépin le Bref en firent à leur tour leur dernière demeure, alors qu’ une nouvelle basilique, longue de 80 mètres, fut entreprise vers 768-769 par l’abbé Fulrad. À l’imitation de Saint-Pierre de Rome, une crypte, constituée d’un couloir annulaire contournant une confession centrale, permettait aux pèlerins de vénérer les reliques de saint Denis et de ses deux compagnons. Vers 832, l’abbé Hilduin édifia une seconde crypte à l’arrière de la précédente. Sous l’abbatiat de ce dernier, on confondit en un même personnage le premier évêque de Paris et Denis l’Aréopagite, converti par saint Paul sur la colline de l’Aréopage d’Athènes, ainsi que le Pseudo-Denys, auteur au début du vie siècle d’un traité sur la hiérarchie céleste pétri de références à Plotin et aux philosophes néo-platoniciens.
Avec la dynastie capétienne, l’abbaye redevint le cimetière des rois, cette fois de façon définitive – sauf à de rares exceptions – plus particulièrement grâce aux efforts de l’abbé Suger, à la tête du monastère de 1122 à sa mort en 1151. Proche du roi, il fit reconnaître saint Denis comme le protecteur particulier du royaume. En véritable architecte, Suger se lança également dans la reconstruction partielle de l’abbatiale, façade et chevet, rédigeant les ouvrages De Administratione et De constructione, dans lesquels il justifie et explique son entreprise. Les travaux commencèrent, vers 1130, par la façade occidentale, dont le parti architectural témoigne des débuts encore balbutiants de l’esthétique gothique. Lors de la consécration de la façade, le 9 juin 1140, il ne restait plus qu’à achever les tours, mais le programme sculpté était déjà en place. Remanié à plusieurs reprises, celui-ci constitue l’un des premiers jalons de la sculpture gothique. Avant leur transformation en 1771, les ébrasements des trois portails s’ornaient de statues-colonnes qui représentaient des rois et reines de l’Ancien Testament. Au portail central figuraient, de façon novatrice, la Passion et la Résurrection sur les vantaux des portes de bronze et, au tympan, le Jugement dernier. Au portail de droite, le tympan représente la dernière communion de saint Denis en prison. Quant au tympan de gauche, il fut remplacé une première fois au milieu du xvie siècle et une seconde fois au début du xixe siècle. Toutefois, Suger rapporte qu’il avait placé là « une mosaïque, nouveauté contraire à l’usage », représentant probablement un triomphe de la Vierge. Il faut également attribuer à Suger, vers 1150, le « portail des Valois », remployé depuis le xiiie siècle au bras nord du transept. Également consacré au saint patron de l’abbaye et aux rois de l’Ancien Testament, ce portail offre un parfait témoignage des efforts de l’abbé pour faire reconnaître le rôle de saint Denis comme protecteur de la royauté.[...]
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Écrit par
- Philippe PLAGNIEUX : professeur des Universités, université de Franche-Comté, École des Chartes
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