BASILIQUE
La basilique, expression achevée de l'urbanisme impérial romain (IIe et IIIe s.)
À vrai dire, c'est en devenant le siège et le symbole de l'autonomie municipale, mais aussi de l'omniprésence du pouvoir central, que la basilique cesse d'être un préau plus ou moins développé, simple annexe couverte du forum, pour acquérir la dimension d'une composante essentielle des centres monumentaux urbains – ce qu'elle n'était pas sur les plus anciens sites républicains. Un processus de fermeture et de monumentalisation se développe dès lors, dont on mesure les progrès depuis la basalica Julia du forum romain jusqu'à la basilica Ulpia du forum de Trajan. Si, au début de l' Empire, les portiques périphériques des basiliques, du moins ceux qui donnent directement sur la place, et les terrasses qu'ils soutiennent sont encore essentiellement tournés vers le forum et peuvent servir en particulier à abriter les spectateurs des combats de gladiateurs (avant la construction des grands amphithéâtres), dès le début du iie siècle, en revanche, l'archéologie et les textes nous apprennent que les déambulatoires des basiliques sont occupés, lors des grands procès, par une foule qui, au premier comme au second niveau, se penche vers la salle centrale pour mieux voir et entendre ce qui s'y passe. Il y a là une conversion au sens propre du terme, de l'extérieur vers l'intérieur, qui entraîne de profondes modifications structurelles et détermine la forme canonique des grandes basiliques impériales.
L'achèvement de cette forme date, dans les provinces de la fin du ier siècle et du début du iie siècle de notre ère ; les témoins archéologiques les plus prestigieux se regroupent dans la seconde moitié du iie et au début du iiie siècle, c'est-à-dire aux époques antonine et sévérienne. Citons seulement les basiliques d'Augst (Suisse), de Bavai, d'Alésia (France), de Trèves (Allemagne), de Silchester (Grande-Bretagne), de Carthage (Tunisie), de Lepcis Magna (Libye). Le plus souvent disposés transversalement sur la frange du forum dont ils occupent toute la largeur, face à un sanctuaire du culte impérial ou de la triade capitoline, ces édifices très imposants comportent une salle centrale quadrangulaire entourée d'une colonnade, le plus souvent à deux niveaux ; cette colonnade soutient un lanterneau dont les parois, percées de fenêtres, assurent l'éclairage de l'ensemble. Des absides semi-circulaires peuvent élargir l'espace interne : généralement ouvertes, comme à Lepcis Magna, sur les petits côtés du rectangle, selon le schéma de la basilica Ulpia, elles se situent plus rarement, comme à Augst, au centre du long côté postérieur. Ces compositions représentent, avec les salles des thermes impériaux, les plus vastes espaces couverts d'un seul tenant que l'Antiquité classique nous ait légués. Quelques chiffres peuvent donner une idée des principales d'entre elles : la basilica Ulpia mesurait sur son axe majeur (absides comprises) presque 170 m de longueur pour un peu moins de 60 m de largeur ; la basilique antonine de Byrsa, à Carthage, découverte dans les années 1970, longue de 85 m et large de 46 m, occupait au sol plus de 3 610 m2 : il s'agit de la plus grande unité architecturale romaine connue à ce jour hors de Rome. Les problèmes de couvrement posés par les salles ou nefs centrales de ces bâtiments n'étaient pas minces, si l'on songe que certaines d'entre elles exigeaient des poutres d'une portée de plus de 20 m. Les progrès accomplis par les architectes romains dans la construction des charpentes de comble à ferme triangulaire permirent de surmonter ces difficultés ; les énormes forces de traction qui s'exerçaient au sommet de ces vertigineux échafaudages de pierre que constituaient les colonnades à ordres superposés (hautes, avec leur attique,[...]
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Écrit par
- Pierre GROS : chaire de civilisation et archéologie romaines à l'Institut universitaire de France, université de Provence-Aix-Marseille-I
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