BEHAVIORISME
Le développement du behaviorisme
Après Watson, la psychologie expérimentale se développe, aux États-Unis, de façon extrêmement rapide ; elle se caractérise, pour l'essentiel, par son inspiration behavioriste. Toutefois il subsiste aussi, parallèlement, une pratique assez étendue de la psychologie non expérimentale, surtout dans le domaine clinique, où le behaviorisme ne pénètre que très lentement et où les courants psychanalytiques deviennent bientôt prédominants.
En psychologie expérimentale générale, si le thème central des recherches et de l'élaboration théorique demeure celui de l'apprentissage, un second thème s'y trouve de plus en plus étroitement lié, selon la même formulation behavioriste : celui de la motivation.
Des années trente aux années cinquante, se déroule un grand débat sur les théories de l'apprentissage, alimenté par de nombreuses recherches expérimentales, soit chez l'animal, à partir de procédures de conditionnement, soit chez l'homme, notamment au moyen des apprentissages par cœur. L'objectif principal est de construire une théorie unifiée du comportement qui soit capable de rendre compte, à partir d'un nombre limité de principes, de postulats ou de lois, de tous les phénomènes observés, aussi bien chez l'animal que chez l'homme. Les chercheurs les plus marquants qui aient travaillé à cette tâche sont, entre autres, Clark L. Hull, Edward C. Tolman, Edwin R. Guthrie, Burrhus F. Skinner.
Ce dernier est sans conteste le plus positiviste et le plus strictement « S-R » des théoriciens behavioristes de cette période ; il répond de façon négative, au moins provisoirement, à la question qu'il a lui-même posée : « Des théories de l'apprentissage sont-elles nécessaires ? » Il construit un système original et un peu marginal par rapport aux autres behavioristes, mais il apporte une contribution expérimentale et théorique importante. En premier lieu, il met en évidence et conceptualise, à peu près en même temps que Jerzy Konorski et Stefan Miller en Pologne, un « second type » de conditionnement, qu'il appelle « opérant » et que Hilgard et Marquis nommeront « instrumental ». Par contraste avec le comportement « répondant » qu'illustre le conditionnement pavlovien, dit aussi « classique », le comportement opérant n'est pas tant déterminé par le stimulus qui le précède que par celui qui le suit. Skinner réinterprète donc l'apprentissage par essais et erreurs, ainsi que la « loi de l'effet » de Edward L. Thorndike, et les intègre à une théorie du conditionnement et du comportement. Il isole ainsi un troisième moyen par lequel l'environnement agit sur celui-ci. Les deux premiers étaient la liaison S-R innée et la liaison S-R conditionnelle classique ; le troisième est la modification du comportement par les stimulus qui le suivent, dont la récompense et sa suppression sont deux cas typiques. On a pris l'habitude – de façon peu heureuse, car cela ajoute à la confusion terminologique – de détourner le terme pavlovien de « renforcement » de son sens primitif pour désigner ce type d'effet du stimulus subséquent.
Toutefois, la théorie behavioriste la plus ambitieuse de cette période a été le système hypothético-déductif de Hull, qui repose sur l'énonciation formalisée d'un certain nombre de « postulats » et de « corollaires » d'où sont dérivées des prédictions qui peuvent être expérimentalement mises à l'épreuve. Bien que le système de Hull n'ait, précisément, pas résisté à l'expérimentation, il a joué un rôle historique très important et a préfiguré l'organisation logique et conceptuelle des modèles de l'époque postérieure.
Ceux-ci ont reposé, pour l'essentiel, sur l'introduction de relations probabilistes entre[...]
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Écrit par
- Jean-François LE NY : professeur à l'université de Paris-VIII
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