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BÉNÉDICTINS

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Des congrégations à la Confédération

Louis Barbo (  1443) fut, à partir de 1408, l'organisateur de la congrégation dite de Sainte-Justine en souvenir de l'abbaye de Padoue qui avait été son berceau. Quand l'abbaye du Mont-Cassin entra dans la congrégation, en 1504, celle-ci prit le qualificatif de cassinienne. Elle compta jusqu'à 190 monastères, situés presque tous en Italie ; elle y existe encore avec 10 abbayes.

À l'exemple de la congrégation de Sainte-Justine, des abbés allemands organisèrent la congrégation de Bursfeld (premier chapitre général en 1446), qui compta environ 200 monastères d'hommes et de femmes.

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La congrégation espagnole dite de Valladolid modela aussi ses constitutions sur celles de Sainte-Justine, et les monastères du Nouveau Monde furent établis sur les mêmes principes.

En France, la congrégation de Chezal-Benoît, organisée en 1488, s'apprêtait à suivre le même chemin, mais les troubles survenus au xvie siècle arrêtèrent son développement.

Dans les pays du nord de l'Europe, Allemagne, Scandinavie ou Grande-Bretagne, les monastères furent supprimés et leurs biens confisqués par les princes.

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Dans son œuvre de restauration, le concile de Trente rattacha les monastères aux congrégations ; il s'agissait d'assurer leur cohésion et leur régularité et de les soumettre plus étroitement au Saint-Siège. Certains monastères y virent un moyen d'échapper à la juridiction des évêques et constituèrent en Belgique et en France des congrégations dites « des Exempts » ; la plupart des monastères ainsi groupés passèrent à des congrégations d'esprit nouveau. Les 55 monastères des Exempts de France (en 1580) étaient réduits à 11 lors de leur suppression en 1768.

Une rénovation partit de Sainte-Vanne de Verdun : nommé prieur en 1598, dom Didier de La Cour introduit une observance proche de la congrégation cassinienne. L'abbaye de Moyenmoutier reçut les mêmes observances et, dès 1604, le pape érigeait la congrégation des Saints-Vanne-et-Hydulphe, du nom des patrons de ces deux monastères. En 1613, dom Bénard, prieur du collège de Cluny à Paris, appela des moines de Saint-Vanne. Quelques monastères français adoptèrent leurs constitutions et, dès 1618, formèrent une congrégation nouvelle, la congrégation de Saint-Maur (disciple de saint Benoît que l'on croyait avoir été le propagateur de la règle en France). Cette congrégation comptera 191 monastères. Cependant l'union avec l'ordre de Cluny échoua, Cluny se scindant en deux : une partie, l'« étroite observance », s'inspirant des constitutions de Saint-Vanne, l'autre, l'« ancienne observance », conservant les « mitigations » (atténuations reçues).

Dans les pays germaniques, la Suisse exceptée, la formation de congrégations fut beaucoup plus difficile. Partout, on s'inspira plus ou moins largement des constitutions de la congrégation cassinienne.

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Dès 1754, Marie-Thérèse d'Autriche entreprit de réorganiser les monastères de ses États en s'inspirant des idées rationalistes de l'époque, et son fils Joseph II accentua cette action. En France, le gouvernement royal œuvra dans le même sens au moyen de la Commission des réguliers (1766-1780), qui prétendait placer la vie monastique sous le contrôle de l'État. Son action se réduisit à des suppressions de maisons : 122 sur 410. Le caractère négatif des décisions de la Commission des réguliers ne doit pas dissimuler que les structures héritées des siècles passés n'étaient plus accordées aux besoins d'une société en pleine transformation.

Plus radicale, la Révolution française supprima le problème, abolissant les vœux de religion, confisquant tous les besoins ecclésiastiques, s'attaquant aux personnes. L'Empire étendit à l'Europe les mesures prises en France, supprimant ici les monastères (Belgique, Bavière, Prusse) et là réduisant leur nombre (Italie, Espagne). Les moines anglais, par contre, qui depuis deux siècles étaient condamnés à vivre en exil en France ou en Espagne, purent rentrer dans leur pays. À la chute de Napoléon, on ne comptait plus guère qu'une trentaine de monastères médiocrement peuplés.

Les restaurations du xixe siècle se firent en ordre dispersé. En Italie, Subiaco fut le centre d'une nouvelle congrégation. En Autriche, les monastères se regroupèrent en deux congrégations qui fusionnèrent en 1930. En Belgique, d'anciens moines d'Afflighem établirent l'abbaye de Termonde en 1837. En France, la restauration s'accomplit grâce à deux prêtres séculiers : dom Guéranger qui, en 1833, fonda Solesmes et la Congrégation de France sur la base des constitutions de Saint-Maur, et dom Muard qui créa, en 1850, Sainte-Marie-de-la-Pierre-qui-Vire, l'unissant à la congrégation de Subiaco. En Allemagne, les frères Wolter s'installèrent à Beuron, en 1860, y fondant une nouvelle congrégation, qui essaima en Belgique en 1872.

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Par fidélité au principe d'autonomie, trois congrégations seront érigées : en 1920, la Congrégation belge, détachée de la congrégation de Beuron ; en 1945, la congrégation de Saint-Adalbert, dont presque tous les monastères situés dans les pays slaves furent fermés ; en 1967, enfin, la Congrégation néerlandaise, détachée de la Congrégation de France.

Les monastères brésiliens constitués en congrégation autonome en 1827 furent sauvés par des moines venus de Belgique. D'Allemagne, puis de Suisse, partirent vers les États-Unis les moines qui y établirent deux congrégations très florissantes, la Congrégation américano-cassinienne et la congrégation helvéto-américaine.

Les révolutions débarrassèrent les monastères de servitudes multiples et firent disparaître les abbés commendataires, ce qui permit à la vie monastique de retrouver dans la fidélité aux origines une vigueur nouvelle.

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En 1880, les abbés de l'ordre, réunis au Mont-Cassin lors du quatorzième centenaire de la naissance de saint Benoît, conscients de constituer un ordre unique, formèrent le vœu que leur union prenne forme, sans que soit porté préjudice à l'autonomie des monastères et des congrégations. En 1893, Léon XIII créa la Confédération bénédictine, mettant à sa tête un « abbé primat », élu pour douze ans par les abbés réunis en congrès. Cet abbé préside le Congrès des abbés, qui connaît des affaires intéressant l'ordre entier.

La Confédération est régie par une loi propre, promulguée par Pie XII en 1952. La règle de saint Benoît se révèle donc assez riche, assez souple et assez indépendante des réalisations qu'elle a suscitées dans le passé, pour répondre aux nécessités spirituelles des temps nouveaux.

— Jacques DUBOIS

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  • : moine bénédictin, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)

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