BENSÉRADE ISAAC DE ou ISAAC (1612-1691)
Originaire de Normandie, Isaac Bensérade vient chercher fortune à Paris et plaît immédiatement à Richelieu. Il s'intéresse d'abord au théâtre (et à une comédienne, la Bellerose) et fait jouer sans grand succès cinq pièces, dont Cléopâtre. À la mort de Richelieu, il gagne la faveur de Mazarin et de la reine, ce qui lui vaut de fort belles pensions. Il a peu de savoir, mais beaucoup d'esprit et devient l'amusement de la Cour : le peignant sous les traits de Théobalde, La Bruyère dira qu'il était « la coqueluche ou l'entêtement de certaines femmes qui ne juraient que par [lui] et sur [sa] parole, qui disaient : cela est délicieux ; qu'a-t-il dit ? ». Diseur de bons mots, à la fois familier et arrogant, il est réputé pour ses impertinences et pour ses épigrammes qui lui valent beaucoup de succès et quelques bastonnades. Poète galant fort apprécié, il rime dans tous les petits genres à la mode ; en 1653, la Cour et le monde des lettres se divisent à la suite de Mme de Longueville et du prince de Conti, son frère, entre « uraniens », partisans du sonnet de Voiture Uranie, et « jobelins », qui lui préfèrent le Job de Bensérade. Celui-ci triomphe dans les ballets de cour dont il s'est assuré le monopole avec Lulli ; il met tout son talent et tout son esprit à donner aux personnages de ces ballets des traits qui sont autant d'allusions malicieuses, ou méchantes, contre ceux mêmes — grands seigneurs et grandes dames — qui en jouent les rôles. Alors qu'il s'est retiré de la Cour et qu'il vient d'être élu à l'Académie française, Louis XIV lui demande de mettre en rondeaux Les Métamorphoses d'Ovide. Le poète tient la gageure, esquissant plus d'ailleurs des croquis en marge de l'œuvre qu'il n'en donne une véritable traduction (1676), mais le livre est un échec dont on le plaisante cruellement et qu'il essaie de faire oublier en adaptant en quatrains les fables d'Ésope. Son temps désormais est passé ; il n'en aura pas moins joui longtemps non seulement d'une grande réputation auprès de la Cour, mais aussi de la considération des meilleurs esprits du siècle.
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Écrit par
- Bernard CROQUETTE : agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Paris-VII
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