CELLINI BENVENUTO (1500-1571)
« Ma vie de gloire et prouesses sans nombre »
En 1531, quand il ouvre son atelier (bottega) à Rome, Cellini est considéré comme le premier orfèvre de son temps. Rien de plus : quelques réalisations prestigieuses (le fermail de Clément VII en 1530), sa nomination comme maître de la monnaie pontificale en 1529 avaient consacré son habileté – comme artiste, comme courtisan et aussi comme défenseur de la cité, lors du Sac, deux ans plus tôt. Pour qui a commencé en réalisant, à la perfection, ces médailles à chapeau, ornements indispensables à la mode masculine dans les années 1525, c'est un beau début.
Quand Cellini, à quarante-cinq ans, met en chantier son Persée, il lance un défi d'une autre ampleur. À Florence, sa ville natale, il n'est reconnu que comme orfèvre ; Éléonore de Tolède, femme de Côme Ier, lui commande encore des bagues, qu'il répugne à exécuter. En France, où il a séjourné de 1540 à 1545, il a goûté à la vraie gloire. François Ier lui a offert un château, le Petit-Nesle, l'a appelé son ami, « mots sidérants dans la bouche d'un roi », et surtout lui a commandé des sculptures. La Nymphe de Fontainebleau (1542-1545, Louvre) lui a ouvert la carrière dont il rêvait. En France, il s'intègre à cette cour de Fontainebleau ouverte à l'Italie : jeu d'influences réciproques qui marquèrent la fin de sa carrière et le maniérisme français. Du point de vue technique, il est possible que Cellini ait eu alors connaissance de certains textes théoriques de Léonard de Vinci, comme les études sur la fonte des bronzes de grandes dimensions faites quand celui-ci, à Milan, travaillait au cavalier Sforza.
Le succès du Persée, placé en 1554 sous la Loggia dei Lanzi entre la Judith de Donatello et le David de Michel-Ange, lui procure un triomphe dont il sent vite toute la vanité. En prison en 1556 – pour meurtre, l'année suivante pour sodomie –, disgracié, il ne reçoit plus de grandes commandes. En butte aux rivalités, aux intrigues de cour – ses rivaux, Baccio Bandinelli, Bartolomeo Ammannati triomphent –, il se mure dans une arrogance qui rappelle sciemment celle de Michel-Ange, réalise encore le Crucifix tourmenté de l'Escorial (1556-1562), et se venge du monde en écrivant sa Vie. L'idée que Benvenuto se fait de lui est très représentative de l'image que les artistes du temps entendaient donner d'eux. Artisan, il l'est resté le moins possible : son Traité de l'orfèvrerie montre comment les matières précieuses qui passèrent par ses mains n'eurent de prix que grâce à son art. Humaniste, il veut l'être, à la manière de Vinci qui ne savait pas le latin : il fait relire sa Vie par l'historien Varchi, ses Traités sont remis en forme sans doute par l'éditeur Gherardo Spini. Il laisse un buste de Bindo Altoviti, marchand romain passionné d'art, pour qui travailla Raphaël (vers 1550, Gardner Museum, Boston). Enfin, il a compris qu'il pouvait encore accéder à une renommée plus haute.
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Écrit par
- Adrien GOETZ : agrégé de l'Université, ancien élève de l'École normale supérieure, maître de conférences à l'université de Paris-IV-Sorbonne
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Médias
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