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BERBÈRES

La langue

Le nom « berbère » est depuis fort longtemps appliqué en français au groupe linguistique le plus anciennement connu dans l'Afrique septentrionale et saharienne. Rien ne montre son arrivée à l'époque historique, mais on n'est pas davantage renseigné sur les langues des populations préhistoriques antérieures, qui ont pu laisser des traces au moins dans la toponymie, de même que l'on connaît encore mal l'effet des contacts du berbère avec les langues africaines. Le mot « berbère » paraît venir de l'arabe. Expressif, il a été appliqué à un langage incompris, donc jugé bredouillant. Grecs et Latins employaient de même « Barbari », que du reste ils n'ont jamais réservé à la seule Afrique. D'où une connotation souvent jugée fâcheuse, qui devrait être oubliée depuis longtemps. Les Berbères n'ont jamais adopté ce nom. Traditionnellement, ils désignaient leur langue par des termes d'acception plus limitée, évoquant le groupe local ou régional : « chleuh », « kabyle », etc. Depuis les dernières décades du xxe siècle, la prise de conscience de l'identité berbère a créé le besoin d'une appellation ayant une portée générale : le choix s'est porté sur amazigh, au féminin tamazight (gh ressemble au r parisien), qui passe sans réelle preuve pour avoir été le nom premier des Berbères.

Situation générale

L'emploi d'un terme unique pour désigner l'ensemble linguistique berbère est justifié par son unité profonde, immédiatement perceptible. Mais cette « langue berbère » ne se présente que sous la forme de parlers locaux, ou de dialectes régionaux qui mériteraient le nom de langues. Souvent l'intercompréhension n'est pas assurée. Tout favorisait la dialectalisation : la dispersion des locuteurs sur un espace immense, leur appartenance à des états peu enclins à promouvoir le berbère, l'absence d'un vrai support culturel ou religieux, la concurrence de langues plus favorisées, à quoi il faut bien ajouter, malgré quelques exceptions, une apparente indifférence des Berbères eux-mêmes. À partir des années 1950, cependant, un mouvement s'est développé pour défendre l'identité berbère et d'abord la langue, désormais dégagées de toute compromission avec les anciens colonisateurs. Des associations de militants ont surgi, d'abord chez les immigrants, puis en Afrique où le berbère est maintenant plus ou moins nettement reconnu.

Faire de lui une langue écrite est devenu une priorité. Il possédait une écriture très ancienne. Des inscriptions rupestres de tout âge sont attestées un peu partout et surtout au Sahara, seules ou à côté de gravures. Au iie siècle av. J.-C., les inscriptions libyques d'Afrique du Nord sont un cas particulier de cette écriture consonantique aux tracés géométriques, qui subsiste chez les Touaregs sous le nom de tifinagh. En fait, elle était réservée à des usages limités. À partir du Moyen Âge, on dispose de textes berbères en caractères arabes. Enfin les chercheurs actuels recourent à des caractères latins aménagés. La modernisation du berbère passe donc par un choix entre les trois écritures, libyco-berbère, arabe et latine. Les Touaregs gardent leur écriture en la perfectionnant. Au Maroc, l'Institut royal de la culture amazighe a retenu les tifinagh révisés. Les Kabyles publient des textes littéraires en caractères latins.

Présent dans neuf États, le berbère occupe sur la carte des aires très inégales. Une liste, qui n'est pas exhaustive, désigne du nord au sud : au Maroc, les montagnes, du Rif à l'Anti-Atlas ; en Algérie, divers points à l'ouest d'Alger et surtout la Kabylie et l'Aurès ; quelques villages tunisiens, notamment à Djerba ; en Libye, Zouara et le Djebel Nefousa ; en Égypte, Siwa. Pour le sud, on mentionnera quelques oasis, Timimoun, le[...]

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Écrit par

  • : professeur de langue berbère à l'université de Provence
  • : directeur d'études retraité de l'École pratique des hautes études, section des sciences historiques et philologiques, Sorbonne, Paris, correspondant de l'Institut de France (Académie des inscriptions et belles-lettres), membre étranger de l'Académie royale des Pays-Bas.
  • : directrice de recherche honoraire au CNRS

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