BERLIN (foyer culturel)
Berlin, capitale des arts ?
Parmi les experts, l’idée en vogue, dans les années 1990, voulait que Berlin, située géographiquement à mi-chemin entre Stockholm et Rome, entre Paris et Moscou, soit vouée à s’imposer comme le point de rencontre des gens de culture de toute l’Europe et à se révéler comme un « tremplin vers l’Est ». Mieux encore, avec son millier d’hectares de réserves foncières pouvant être affectées à l’industrie, son avenir semblait celui d’une « métropole économique ».
Pourtant, si Berlin a développé ses relations de voisinage avec la Pologne, elle ne s’est pas illustrée comme le pôle d’attraction de l’Europe orientale, pas plus qu’elle n’est devenue un centre d’affaires à l’échelle européenne.
En tant que capitale de l’Allemagne, elle mérite la qualification de métropole. Mais cette qualification ne lui est pas adaptée par rapport aux agglomérations de Moscou, Paris, Londres, où sont concentrés trois fois plus d’habitants. D’ailleurs, en l’an 2000, les pronostics définissant Berlin comme la «plaque tournante», le «cœur» battant du continent, sont vite apparus peu réalistes. Que Berlin soit perçue par beaucoup de visiteurs comme «la plus attirante», « la plus moderne » des villes, pour reprendre ce qu’a ressenti, en 2003, l’écrivain et cinéaste Claude Lanzmann, n’autorise pas à la gratifier d’une hégémonie européenne.
Certes, Berlin-Ouest et Berlin-Est, dans leur fusion, forment un exceptionnel foyer de culture : trois opéras, chacun avec ses propres musiciens et son corps de ballet ; trois salles de concert, accueillant les chefs d’orchestre les plus talentueux ; une trentaine de théâtres ; une centaine de musées. Mais cet héritage implique de lourdes charges financières.
Pour les arts plastiques, les manifestations berlinoises n’en sont toujours pas arrivées à surpasser les foires de Cologne, de Bâle, voire de Paris, ni à détrôner les ventes dans les galeries européennes de renom. Dans les musées de Berlin, les expositions, soumises comme partout à une programmation de plus en plus internationalisée, n’éclipsent pas les collections conservées dans des villes comme Amsterdam, Rome, Venise ou Madrid.
À Berlin, les plus beaux cinémas sont là, remarque l’historien de l’architecture Arnt Cobbers en 2005, ils n’attendent que leurs clients. Le bilan vaut pour toute la sphère de la culture. Les théâtres fonctionnant sur l’ancien territoire de Berlin-Est, comme le Deutsches Theater, la Volksbühne ou, prolongeant l’œuvre de Brecht, le Berliner Ensemble, ont surtout pour spectateurs des Allemands originaires de l’Ouest. Pourquoi ? Le prix des billets a été multiplié par quatre après la dissolution de la R.D.A. Malgré tout, la riche tradition théâtrale de Berlin, avec des metteurs en scène comme Claus Peymann, Frank Castorf ou Thomas Ostermeier, est opiniâtrement poursuivie.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Lionel RICHARD : professeur honoraire des Universités
Classification
Médias