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BERLIN (JEUX OLYMPIQUES DE) [1936] Les nazis et l'olympisme

Complicités et naïvetés

Helene Mayer, 1936 - crédits : Library of Congress, Washington D.C.

Helene Mayer, 1936

Les nazis ont annexé les Jeux de 1936 pour glorifier leur régime et sont parfaitement parvenus à leurs fins. Leur stratégie, fondée sur la duperie, s'avéra certes très au point, mais le triomphe nazi ne fut possible que grâce à la naïveté – voire à la complicité – des instances sportives internationales et du C.I.O., mais aussi des politiciens.

Quand les nazis entament leurs grandes manœuvres en vue des Jeux, le contexte politique international est plutôt propice pour que leur entreprise ne soit guère contrariée. En effet, de nombreux pays sont en proie à des problèmes internes et ne se soucient pas suffisamment de la montée en puissance du Reich et de la diffusion des idéaux barbares. Le Royaume-Uni est ébranlé par le futur mariage du roi Édouard VIII avec une Américaine divorcée, Wallis Simpson, qui provoquera l'abdication du monarque ; le Premier ministre Stanley Baldwin, affaibli, démissionnera en 1937. En Espagne, le Frente popular arrive au pouvoir en février 1936, le pronunciamiento du général Franco marquera bientôt le début de la guerre civile. En France, la période est agitée depuis les troubles occasionnés par l'extrême droite en 1934 ; le Front populaire arrive au pouvoir en mai 1936. L'Italie fasciste ne conteste bien sûr pas la légitimité nazie. Aux États-Unis, on se remet à peine de la Grande Dépression et les affaires européennes ne constituent pas la priorité du moment. En outre, en Europe, de nombreux politiciens conservateurs ne sont pas fâchés des rudes coups portés aux communistes en Allemagne, alors que l'Église catholique se satisfait du concordat signé en 1933 avec l'Allemagne nazie...

Les politiciens du monde entier ne se préoccupent donc guère des questions olympiques. Néanmoins, en France, le Parlement débat au sujet de l'octroi des subventions qui permettront aux sportifs français de se rendre aux Jeux de Berlin : le gouvernement de Front populaire se déclare favorable à ces subventions et tous les députés, à l'exception de Pierre Mendès France, votent les subventions, entérinant donc la participation des Français aux Jeux de Berlin.

La responsabilité du mouvement olympique est également engagée. Henri de Baillet-Latour adresse certes de nombreuses mises en garde au führer au sujet du respect de la Charte olympique et du protocole, mais il se satisfait à chaque fois des réponses, verbales ou écrites, du chancelier du Reich, et de quelques petites reculades nazies. Pourtant, dès le mois de mai 1933, Henri de Baillet-Latour écrit à tous les membres du C.I.O. et leur confie ses inquiétudes concernant les Jeux de Berlin. Il évoque certes les « mesures d'exception » prises par le nouveau régime à l'encontre de certains sportifs (les Juifs), mais il déplore surtout que celles-ci soient rapportées dans la presse internationale, que des fédérations de sports s'insurgent contre ces dispositions, déclenchant un mouvement hostile aux Jeux de Berlin ; il se félicite que le C.I.O. ne soit jusque-là pas intervenu dans le débat, s'inquiète de l'opposition que dix-huit universités allemandes, noyautées par les organisations étudiantes nazies, manifestent vis-à-vis de la tenue des Jeux dans l'Allemagne nouvelle... Le fond de la lettre du comte est tristement édifiant : il ne propose nullement que les Jeux soient transférés, bien au contraire. Il invite les membres du C.I.O., qui doit tenir session au début du mois de juin 1933 à Vienne, à conforter le choix de Berlin tout en rappelant au chancelier du Reich la lettre de la Charte olympique : « Ils [les Jeux] doivent réunir les amateurs de toutes les nations du monde sur un pied d'égalité aussi parfait que possible, c'est-à-dire qu'ils n'ont aucun caractère politique, racique (sic), national ou confessionnel. » Il indique néanmoins qu'« au[...]

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Écrit par

  • : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs

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