BERNADOTTE JEAN-BAPTISTE (1763-1844) , roi de Suède et de Norvège sous le nom de CHARLES XIV (1818-1844)
Fils d'un magistrat de Pau, engagé à dix-sept ans, sergent-major en 1788 et connu alors sous le sobriquet de « Belle Jambe », Bernadotte prend ses grades dans les armées de la Révolution, devient le lieutenant de Jourdan à l'armée de Sambre-et-Meuse puis de Bonaparte à l'armée d'Italie. Ambassadeur à Vienne pendant deux mois en 1798, il y rencontre Beethoven et lui conseille de consacrer une symphonie à Bonaparte. Ministre de la Guerre en 1799, il refuse de participer au 18-Brumaire. Bonaparte le ménage, car Bernadotte a épousé Désirée Clary, ancienne fiancée du Premier consul, et se trouve ainsi le beau-frère de Joseph Bonaparte ; il est presque membre de la « famille » — ce qui ne l'empêche pas de multiplier les intrigues, quitte à désavouer ses affidés dès que les choses tournent mal.
Les principaux exploits militaires de Bernadotte dans les années glorieuses sont les suivants : en 1805, il ne sert que peu à Austerlitz ; en 1806, il reste inactif à quelques kilomètres d'Auerstaedt où Davout (qui l'avait en vain appelé à l'aide) remporte seul la victoire ; en 1807, il ne rejoint le gros de l'armée que quarante-huit heures après Eylau, malgré les ordres exprès de Napoléon ; en 1809, il commande à Wagram le corps des Saxons qui se débandent, puis leur attribue tout le mérite de la victoire dans un ordre du jour ronflant. Cette fois Napoléon le casse de son commandement.
Il noue encore quelques intrigues, qui tournent mal, avec Fouché pendant l'été de 1809. Et puis l'inlassable activité du prince de Ponte-Corvo (prince à titre civil, car Napoléon n'a pu ni voulu lui donner aucun duché à titre militaire pour célébrer ses faits d'armes) va trouver enfin un champ à sa mesure : il avait pris soin de ménager ses adversaires suédois dans la campagne de 1806-1807 en Poméranie ; en 1810, il réussit à se faire élire prince héréditaire de Suède avec promesse de succession au trône, et extorque non sans mal le consentement de Napoléon méfiant, en lui jurant une loyauté indéfectible. Dès 1812, il s'allie avec le tsar ; en 1813, il commande avec succès une des armées alliées en Allemagne ; en 1814, il commande l'armée d'invasion contre la Belgique. À l'annonce de la chute de Paris, il y accourt dans l'espoir de succéder à Napoléon sur le trône de France, grâce à l'appui du tsar ; mais la trahison est trop fraîche pour que la candidature soit viable.
Bernadotte va se consoler en arrachant la Norvège au Danemark, malgré l'opposition unanime de la population norvégienne. En 1818, de prince héréditaire il devient roi sous le nom de Charles XIV et se montre à tout le moins un aussi bon roi que tous les monarques nés sur le trône, à la satisfaction et à l'estime de ses sujets. Quand il mourra, chargé d'ans et de respectabilité, on découvrira sur sa poitrine un tatouage : « Mort aux rois ! » — et on comprendra enfin pourquoi le roi de Suède refusait toujours démocratiquement, avec autant de simplicité que de modestie, de se laisser déshabiller par ses valets de chambre.
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Écrit par
- Jean MASSIN : écrivain
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NORVÈGE
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...d'Augustenbourg, héritier de Charles XIII, roi de Suède, mais la mort du prince la même année (1810) fit échouer ce projet. Dans ces conditions, le traité de Kiel entre la Suède et le Danemark (14 janv. 1814), qui donnait la Norvège àBernadotte, régent et futur roi de Suède, offusque les Norvégiens. -
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