GIRAUDEAU BERNARD (1947-2010)
Né le 18 juin 1947 à La Rochelle, Bernard Giraudeau est le fils d'un militaire de carrière que ses affectations éloignent de sa famille. En 1963, le jeune homme s'engage pour sept ans dans la marine nationale. Après une formation de mécanicien, il sert comme matelot puis quartier-maître sur plusieurs bâtiments, et fait ainsi par deux fois le tour du monde. De retour à la vie civile, il exerce divers métiers avant de s'intéresser à l'art dramatique et d'intégrer une troupe théâtrale à La Rochelle. En 1971, il entre au Conservatoire national supérieur d'art dramatique dont il sort, trois ans plus tard, avec un premier prix de comédie classique et moderne. Dans le même temps, il commence à se produire sur scène, puis, à partir de 1973, à la télévision et au cinéma. Après une apparition dans un film italien, il débute dans Deux Hommes dans la ville de José Giovanni (1973), au côté de Jean Gabin et d'Alain Delon.
Au sortir du Conservatoire, Bernard Giraudeau s'affirme au théâtre dans Sur le fil de Fernando Arrabal (1975), Le Prince de Hombourg de Heinrich von Kleist (1975) et La guerre de Troie n'aura pas lieu de Jean Giraudoux (1976). En dépit de ses activités au cinéma et à la télévision, il n'abandonnera jamais la scène : de 1971 à 2003, il joue dans dix-huit pièces d'auteurs classiques (William Shakespeare, Jules Renard, Oscar Wilde) et contemporains (Jean-Claude Carrière, Patrick Meyers, Eric-Emmanuel Schmitt) sous la direction de metteurs en scène prestigieux (Jorge Lavelli, Jean Mercure, Jean Négroni, Jérôme Savary, Georges Wilson), ce qui lui vaudra d'être nommé par trois fois pour le Molière.
Au cinéma et à la télévision, Bernard Giraudeau met plus de temps pour faire reconnaître son talent. Comme il est grand et beau, qu'il a du charme, des yeux bleus au regard profond et un sourire enjôleur, on le limite à des rôles de copain, de voisin ou de gendre sympathiques et dévoués. Il a beau interpréter un médecin militaire cynique dans Le Toubib de Pierre Granier-Deferre (1979), un officier conquérant épris d'un laideron dans Passion d'amour d'Ettore Scola (1981), un séducteur manipulateur dans L'Année des méduses de Christopher Frank (1984), un banlieusard adepte des arts martiaux dans Rue Barbare de Gilles Béhat (1984), on ne veut voir en lui qu'un « beau gosse », charmeur et insolent. Ce n'est qu'avec son interprétation d'un policier alcoolique, dans Poussière d'ange d'Édouard Niermans (1986), qu'on l'estime enfin comme acteur, et avec celle d'un escroc pris à son propre piège, dans Vent de panique de Bernard Stora (1987), qu'on lui découvre aussi un don, rare, pour la comédie. Il tient, dès lors, des rôles plus riches et plus ambigus, notamment dans Le Fils préféré de Nicole Garcia (1994), Ridicule de Patrice Leconte (1996), Une affaire de goût de Bernard Rapp (2000), trois films qui lui valent d'être cité pour un césar. Mentionnons également Gouttes d'eau sur pierres brûlantes de François Ozon (2000) et Je suis un assassin de Thomas Vincent (2003).
Comme s'il luttait contre une angoisse existentielle, Bernard Giraudeau, qui reconnaissait que « la fuite est devenue [sa] psychanalyse, la seule manière d'entrer en [soi]-même et d'y être bien », éprouve le besoin de diversifier ses activités. Il se lance dans l'écriture du scénario et la réalisation de téléfilms et de films : La Face de l'ogre (1988), L'Autre (1991), Un été glacé (1992) et Les Caprices d'un fleuve (1996). De sa jeunesse, il a conservé l'envie de bourlinguer. Il voyage donc et rapporte de ses pérégrinations des documentaires, quatre au total : La Transamazonienne (1992), Un ami chilien, Chili-Norte-Chili (1999), Esquisses Philippines (2003). Ses voyages favorisent aussi[...]
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Écrit par
- Alain GAREL : critique et historien de cinéma, professeur d'histoire du cinéma
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