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HAITINK BERNARD (1929-2021)

Bernard Haitink naît le 4 mars 1929 à Amsterdam (Pays-Bas). Il commence l’étude du violon à neuf ans et la poursuit au Conservatoire de sa ville natale sous la houlette de Felix Hupka. Peu convaincu de la valeur de son propre talent, il restera longtemps persuadé qu’il ne doit sa carrière qu’à l’éviction de ses camarades juifs pendant l’occupation allemande. Il intègre à vingt-cinq ans le pupitre des violons de l’Orchestre philharmonique de la radio néerlandaise, avant d’en devenir rapidement, en 1954, le chef principal. La même année, il remporte un concours local de jeunes chefs. Ferdinand Leitner le remarque, parachève sa formation et lui confie, en 1955, le poste de second chef de l’Orchestre de l’Union des radios néerlandaises.

En 1956, il remplace au pied levé Carlo Maria Giulini à la tête du Concertgebouw d’Amsterdam pour un Requiem de Cherubini. Ce succès marque les esprits. En 1961, il succède à Eduard Van Beinum comme directeur musical de cette prestigieuse phalange. Cette alliance durera vingt-sept ans et ne sera rompue qu’en 1988, quand son refus d’accepter un plan de réduction des effectifs précipite son départ. Depuis plusieurs années, sa réputation a franchi les frontières. De 1967 à 1979, il va présider aux destinées de l’Orchestre philharmonique de Londres. Il remplace John Pritchard à la direction du festival de Glyndebourne (1978-1988) et assume les fonctions de directeur musical du Covent Garden de Londres (1987-2002). Bernard Haitink est réclamé par les ensembles les plus illustres : l’Orchestre de Boston (1995), la Staatskapelle de Dresde (2002-2004) ou encore l’Orchestre symphonique de Chicago (2007-2010). Il donne son dernier concert, à la tête de l’Orchestre philharmonique de Vienne, en septembre 2019 au cours du festival de Lucerne (Suisse) et meurt à Londres le 21 octobre 2021.

La modestie naturelle et le tempérament introverti de cette antistar ne le prédisposaient pas à exceller dans l’univers lyrique. La probité de son approche et la rigueur de son travail lui ont néanmoins offert, à côté de belles réalisations dans les opéras de Mozart, Beethoven et Wagner, de remarquables interprétations du Rake’s Progress de Stravinski (1975) et du Pelléas et Mélisande de Debussy (2000). Ce chef symphonique reste l’un des plus attachants de son temps. Ennemi des effets spectaculaires, il impose, avec une gestique sobre et efficace, une intransigeante fidélité à la partition et un style soucieux tout autant d’éclairer l’architecture musicale que de préserver la précision des détails. Dans une vaste discographie, ce maître du grand répertoire romantique nous offre une impressionnante série d’intégrales symphoniques, toutes marquées par une sincérité intense et concise : Beethoven, Brahms, Schumann, Tchaïkovski, Bruckner, Mahler (sans doute une des meilleures versions des symphonies de ce compositeur), Vaughan Williams, sans oublier les poèmes symphoniques de Liszt et les ballets de Stravinski. S’il s’ouvre rarement à la musique de ses contemporains, il est néanmoins le maître d’œuvre de plusieurs créations : Divertimento pour orchestre de Henri Barraud (1964), Magnificat de Frank Martin (1968), Cortège de Colin Matthews (1969), Philharmonic Concerto de Malcolm Arnold (1976), The World in the Evening de Nicholas Maw (1988), Wagner Nights de Robin Holloway (1990) et Chicago Remains de Mark-Anthony Turnage (2007). Sous le sérieux du discours et de l’attitude se dissimule un inattendu sens de l’humour. À son biographe Peter Hagmann qui lui demandait : « Croyez-vous que la musique ait le pouvoir de rendre l’homme meilleur ? », Bernard Haitink répondit : « Oui sûrement, mais pas longtemps. »

— Pierre BRETON

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