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BERNARDIN DE SIENNE saint (1380-1444)

Noble siennois de la lignée des Albizzeschi, Bernardin fut en Italie le prédicateur de son siècle. Entré chez les Franciscains en 1402 à l'issue d'une maladie où il fut visité par un songe, il déploya de 1405 jusqu'à sa mort une activité aussi intense que variée au service de son ordre et d'un idéal religieux dont la coloration lui valut quelques difficultés à la cour de Rome. Il se consacra particulièrement à la réforme, toujours en question, de l'ordre auquel il appartenait, à la composition d'ouvrages de méditation et d'instruction religieuse (De la religion chrétienne en 1427, De l'Évangile éternel en 1428, Des inspirations en 1443, etc.), enfin à la prédication apostolique en Ombrie et en Toscane, où il fit ses premières armes en 1405, puis en Lombardie, en Vénétie et jusqu'à Rome. Des foules se rassemblent pour l'entendre, même sur les places publiques quand les églises s'avèrent insuffisantes : à Milan en 1417, à Florence en 1424, à Florence de nouveau et à Sienne en 1425. À Sienne encore, en 1427, il prononce, sur la place du Campo qui s'étend devant le Palais de la commune, une partie au moins des quarante-cinq sermons qui nous ont été conservés par un auditeur enthousiaste et apparemment fidèle. Bernardin ne s'aidait, en effet, pour prêcher, que de notes sommaires jetées en latin sur un feuillet, et rien n'aurait subsisté de son éloquence en langue vulgaire si un modeste artisan drapier de Sienne n'avait entrepris d'enregistrer ses paroles, « une à une » affirme-t-il, et de les transcrire le jour même de sa plus belle écriture. Hors de là ne nous sont parvenus que des résumés en langue vulgaire ou des « notes d'écoutes » en latin, dus à des témoins parfois plus vigilants qu'admiratifs.

Si les sermons de saint Bernardin (Le Prediche volgari di san Bernardino da Siena, 3 vol., Sienne, 1880-1888 ; Opera omnia, Quaracchi-Florence, en cours de publication depuis 1950) ne versent jamais dans la trivialité cocasse, qui se voulait alléchante, de ces prédicateurs populaires dont Dante avait dénoncé, un siècle auparavant, l'indécent brio, ils restent fort loin de l'éloquence des orateurs religieux de haut rang s'adressant à des auditoires de cour. Non qu'il n'y eût pour les entendre que des gens simples : la fresque de Neroccio di Bartolomeo, qui représente, au Palais communal de Sienne, saint Bernardin prêchant devant ses concitoyens, met en scène, au premier plan, des auditeurs richement vêtus et des humanistes tels que le Pogge ou Guarino de Vérone, qui n'ont pas moins d'estime pour l'orateur que pour le propagandiste religieux. Les sermons qui nous sont parvenus, et dans lesquels le transcripteur semble n'avoir omis ni les interjections ni les onomatopées, font voir, auprès d'une singulière énergie verbale dans le procès des vices de tout genre, un art de la persuasion éminemment direct, développé sur une gamme qui va des images terrifiantes de la damnation aux promesses exaltées du salut, de l'exécration du péché appuyée sur des évocations répugnantes à l'adjuration, narquoise ou cordiale, qui, sur le ton d'un rappel à l'évidence, à l'expérience quotidienne de chacun, ne veut que conduire de nouveau à Dieu, sans éclats et comme sans surprise, des esprits égarés par l'inattention ou l'oubli. C'est à cette fin que concourent le plus souvent les apologues concis, les anecdotes, les nouvelles, enfin les dialogues, qui, fictifs parfois mais aussi proposés avec insistance à l'auditoire, donnent à ces sermons leur variété, leur pittoresque et leur force.

Cette même année 1427, saint Bernardin comparut pour la première fois devant le tribunal romain. Il faut dire que les Franciscains, parmi lesquels s'étaient recrutés, du milieu du [...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris

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