TELESIO BERNARDINO (1509-1588)
Né à Cosenza, où il devait mourir accablé de maux après une longue vie de recherches, le philosophe Telesio étudie d'abord à Milan, sous la direction de son oncle Antonio, savant lettré. Appelé à enseigner la jeunesse romaine, il perd, au moment du sac de Rome en 1527, tout ce qu'il possède. À Padoue, où il étudie l'optique, les mathématiques et la philosophie, il commence à combattre les opinions des philosophes anciens, et surtout Aristote, qui règne alors en maître. Docteur en philosophie en 1535, il retourne à Rome, puis revient dans sa patrie et se retire pour méditer dans un couvent de bénédictins. À Naples, vers 1545, il commence à écrire ; mais ses scrupules de chercheur lui font retarder jusqu'en 1565 la publication de son œuvre majeure, La Nature (De natura rerum libri II), qui connaîtra de son vivant plusieurs éditions augmentées. Sa réputation philosophique l'accompagne partout ; il est célébré en vers ; ses doctrines sont défendues à Bologne, à Venise et à Padoue ; Pie IV lui offre, en 1564, l'archevêché de Cosenza, qu'il refuse ; mais Telesio accepte la chaire que Grégoire XIII lui propose. La mort de deux de ses fils et de sa femme, des difficultés économiques et l'acharnement des aristotéliciens troublent son existence, mais ne le font pas dévier de la voie qu'il s'est tracée : rejeter la théorie aristotélicienne de la forme et de la substance et tout principe transcendant au nom d'un naturalisme immanentiste fondé sur le double principe matériel et antithétique du chaud et du froid. À la hiérarchie ontologique d'Aristote il substitue une conception continuiste des phénomènes de la nature, dont la différence et le développement ne sont que l'effet des divers degrés de chaud et de froid, conception qui n'introduit aucune distinction qualitative entre l'homme et l'animal. Ces idées, qui heurtaient de front les conceptions philosophiques et religieuses traditionnelles, valurent à Telesio d'être mis à l'Index cinq ans après sa mort, mais d'être honoré par Patrizzi, par Gassendi et surtout par Campanella.
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Écrit par
- Jean-Claude MARGOLIN : professeur de philosophie à l'université de Tours, directeur du département de philosophie et histoire de l'humanisme au Centre d'études supérieures de la Renaissance, Tours
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