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RIEMANN BERNHARD (1826-1866)

Fonction ζ et répartition des nombres premiers

La partie, célèbre entre toutes, de l'œuvre de Riemann concernant la fonction ζ tient en une dizaine de pages, adressées en 1859 à l'Académie de Berlin, qui venait de l'élire membre correspondant.

La fonction ζ (cf. fonctionzêta) est définie d'abord, pour Re s > 1, comme somme de la série de Riemann :

Euler avait montré que 1/ζ(s) est produit des facteurs 1 − ps, p premier ≥ 2, d'où ζ(s) ≠ 0 pour Re s > 1 ; il avait d'autre part défini la fonction Γ par :

pour Re s > 0, et obtenu la formule des compléments :
d'où découle un prolongement méromorphe de Γ à tout le plan, avec comme pôles (simples) les entiers ≤ 0.

Notons ln la détermination principale du logarithme complexe (holomorphe sur le complémentaire du demi-axe réel négatif, et de partie imaginaire comprise entre ± π), et L le chemin suivant décrit par le point z = x + iy = reiθ : d'abord x décroît de + ∞ à 0, y restant égal à 1 ; puis θ croît de π/2 à 3 π/2, r restant égal à 1 ; enfin x croît de 0 à + ∞, y restant égal à − 1. Avec ces notations, Riemann obtient la formule :

où l'intégrale est une fonction entière de s, d'où un prolongement méromorphe de ζ à tout le plan, avec le seul pôle (simple) s = 1 ; puis il montre que :
est une fonction entière et une fonction paire de s − 1/2 ; la fonction ζ(s) ne pouvant s'annuler que pour Re s ≤ 1, la fonction ξ(s) ne peut s'annuler que pour 0 ≤ Re s ≤ 1.

Puisqu'on a la formule :

on conçoit qu'une analyse subtile puisse lier, d'une part, la croissance avec x réel du nombre π(x) des nombres premiers inférieurs à x, ou de la somme θ(x) des logarithmes de ces nombres premiers et, d'autre part, le comportement, quand T → ∞, de :
avec b > 1. Pour appliquer à cette intégrale la méthode des résidus, on complète le chemin d'intégration en le périmètre d'un rectangle de sommets a ± iT, b ± iT, avec 1/2 < a < 1, et cela de manière que ζ ne s'annule ni sur l'aire ni sur le périmètre du rectangle.

C'est pourquoi Riemann formule en ces termes sa célèbre hypothèse : « Il est très probable que tous les zéros de ξ ont une partie réelle égale à 1/2, mais j'ai laissé cette recherche de côté pour le moment après quelques rapides essais infructueux. » Plus d'un siècle après, cette hypothèse n'a pu être ni confirmée ni infirmée. Par contre, Hadamard et La Vallée-Poussin réussirent l'un et l'autre, en 1896, par des méthodes parallèles mais distinctes, à poursuivre l'analyse sans recourir à l'hypothèse de Riemann : La Vallée-Poussin y parvint en prenant a = 1 − c/ln T pour T assez grand, la constante c étant convenablement choisie. La conclusion fut le théorème fondamental :

quand x → + ∞, conjecturé par Legendre dès 1798 et ainsi démontré près d'un siècle plus tard.

Après ce succès, les spécialistes portèrent leur effort sur la recherche d'une démonstration élémentaire, c'est-à-dire évitant les fonctions d'une variable complexe : il fallut encore attendre 1948 pour que ce but fût atteint simultanément par Selberg et Erdös.

— Michel HERVÉ

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