BHOUTAN
Nom officiel | Royaume du Bhoutan |
Chef de l'État | Le roi Jigme Khesar Wangchuk - depuis le 14 décembre 2006 |
Chef du gouvernement | Tshering Tobgay - depuis le 28 janvier 2024 |
Capitale | Thimphou |
Langue officielle | Dzongkha |
Population |
786 385 habitants
(2023) |
Superficie |
38 390 km²
|
Article modifié le
L'architecture
Au cours du règne du roi tibétain Srong-bTsan sGam-po, deux temples furent construits au Bhoutan : le sKyer-chu lhakhang, dans la vallée de sPa-gro, et le Byams-pa‘i lha-khang, à l'ouest de l'actuel rDzong (monastère-forteresse) de Bya-dkar dans la plaine de Bumthang. Il semblerait, d'après le Mani bKa' 'bum, que ces temples étaient les éléments nord et ouest d'un diagramme destiné à juguler la religion pratiquée jusqu'à cette date. Le roi construisit douze édifices bouddhiques qui figuraient douze pieux destinés à fixer au sol et à anéantir la démone de l'hérésie.
Ces deux temples construits aux environs de 640-660 marquent la naissance de l'art du Bhoutan, art dont le style évoluera mais dont les thèmes seront toujours liés à la tradition bouddhique.
Les rDzong
L'architecture s'illustre par les édifices religieux : forteresses, monastères fortifiés (rDzong), temples (lhakhang), mchod-rten et par des constructions civiles. Forteresses, sièges du pouvoir civil, les rDzong étaient situés aux points stratégiques, à l'origine destinés à défendre le pays contre l'envahisseur. Ils se dressent, majestueux dans un décor grandiose. Zhabs-drung en fut l'instigateur. Ces bâtiments revêtent souvent la forme de parallélogrammes et reposent sur des fondations de pierres. Leurs façades de terre séchée sont blanchies à la chaux, une bande décorative de couleur rouge court sous les deux toits en bardeaux : le premier, soutenu par des consoles, est en saillie ; le second, légèrement en retrait, est couronné d'un lanternon, lui-même coiffé d'un troisième toit orné de motifs de bronze. Les fenêtres étroites ouvertes aux étages supérieurs, entourées de chambranles de bois, sont parfois en encorbellement. Une seule porte, étroite elle aussi, permet de pénétrer à l'intérieur de l'édifice, au centre duquel se déploient une ou plusieurs cours. Les étages qui les bordent se frangent de galeries pourtournantes. D'autres édifices occupent dans certains cas, sur plusieurs niveaux, les cours intérieures. Une partie de l'édifice est réservée à l'administration civile, l'autre au domaine religieux, et comprend un monastère avec dortoirs, salles de prière, d'enseignement, appartements privés, réfectoires, de nombreuses chapelles, des bibliothèques. Les plafonds des salles les plus vastes sont soutenus par des colonnes et des piliers surmontés de chapiteaux ouvragés et consoles, en bois peint. Les murs sont décorés de scènes religieuses. Les Bhoutanais sont fiers de leur architecture qui ignore les clous.
La plupart des rDzong, endommagés par des incendies ou des tremblements de terre, furent remaniés au cours des siècles. Le plus ancien, Sems-rTogs-kha construit en 1627, présente l'intérêt de demeurer dans son état initial tant pour l'architecture que pour la décoration. Il est constitué d'une importante construction centrale et de locaux annexes disposés le long d'un rempart. sPu-na-kha fut construit par Zhabs-drung entre 1636 et 1637 au confluent du Paro-chu et du Mo-chu ; long d'environ cent quatre-vingts mètres, large de soixante-douze, sa cour centrale comporte au sud une tour rectangulaire de six étages qui abrite les chapelles mortuaires des premiers rGyal-chab. Le rDzong de sPa-gro, appelé aussi Rin-spungs, construit par Drung-Drung au xve siècle, transformé par Zhabs-drung en 1645, détruit par un incendie au début du xxe siècle, fut reconstruit selon le même modèle. Un ensemble de bâtiments, haut de cinq étages, bâti à flanc de colline enclot un espace rectangulaire sur deux niveaux. Au centre de la partie supérieure se dresse un bâtiment de sept étages qui ne comporte que des chapelles ; l'une d'elles est réservée au culte des divinités protectrices. Une redoute arrondie, rTag rDzong, devait protéger la forteresse ; transformée aujourd'hui en musée, elle s'élève sur cinq étages disposés selon un plan hélicoïdal.
L'unique chemin qui reliait autrefois l'est à l'ouest du pays traversait le rDzong de Krong-sar bâti en 1648 par Zhabs-drung, restauré par Ugyen Wangchuk, le premier roi du Bhoutan, dont il est le berceau. Il est précédé comme sPa-gro d'un rTag rDzong (redoute) utilisé jadis comme arsenal. Le bâtiment principal se caractérise par une grande irrégularité du niveau des toits, correspondant aux niveaux des trois cours intérieures. dBang-'dus pho brang, construit entre 1638 et 1639, reçut par la suite l'adjonction d'un toit d'or. Situé entre deux fleuves, il était relié à l'une des rives par l'un des plus beaux ponts du Bhoutan. Le plus grand monastère-forteresse du Bhoutan, bKra-shis chos-rDzong à Thimphou, fut reconstruit il y a peu d'années pour abriter les services du gouvernement et servir de résidence d'été au rJe Khenpo, le chef de l'Église bouddhiste ; situé au fond de la vallée et non sur un éperon rocheux, il occupe l'emplacement d'un monastère fondé par Phajo au xiiie siècle, transformé en rDzong par Zhabs-drung en 1641, agrandi en 1755, incendié en 1869, restauré en 1870 et augmenté d'un temple. Le rDzong actuel, terminé en 1969, est de proportions saisissantes ; le bâtiment ancien constitue le monastère central.
Il faut aussi mentionner Bya-dkar dans la vallée de Bumthang, avec sa tour de plus de cinquante mètres, Ha, fief de la famille Dorje, lHun-rtse, bKra-shis-sgang, à pic sur la rivière Manas, et 'Brug-rGyal rDzong, bâti en 1649 par Zhabs-drung à quinze kilomètres de sPa-gro pour défendre la route qui conduit à Phari au Tibet. Cette forteresse, qui permit au Bhoutan de repousser les armées tibétaines au xviiie siècle, s'élevait à pic sur trois côtés d'une colline ; trois tours reliées par une double enceinte défendaient le quatrième côté. Mais depuis l'incendie de 1950, il n'en subsiste que des ruines.
Monastères et temples (lhakhang)
Les lhakhang suivent pour les grandes lignes les règles architecturales des rDzong. Si les proportions diffèrent, le plan est identique, un parallélogramme, et les matériaux sont les mêmes. Certaines façades sont à ressauts (rTa-mgo), le sanctuaire principal est parfois constitué de trois étages décroissants (sKyer-chu). Les lhakhang sont des lieux de culte destinés à abriter les images religieuses les plus précieuses. Le plus souvent placé au centre d'un monastère, le temple est parfois isolé ; dans ce cas, il est entouré à l'extérieur d'une rangée de moulins à prières et de « chevaux du vent », longues bannières blanches imprimées de formules pieuses. Le toit est orné de dômes dorés en forme de cloche, dont le nombre varie en fonction du nombre des autels. Malheureusement, les deux temples les plus anciens ne conservent plus rien de leur aspect d'origine. Le Byams-pa'i lhakhang fut transformé à plusieurs reprises. sKyer-chu connut de multiples changements ; en 1965, la reine mère fit construire, accolé au temple original, un lhakhang typique du style bhoutanais, comprenant une pièce triangulaire, peu éclairée, garnie de statues, de peintures murales et mobiles.
sTag-Tshang, dans la vallée de sPa-gro, est le monastère le plus impressionnant. Bâti à flanc de montagne, il domine de 300 mètres le Paro-chu. La tradition fait remonter très loin sa construction puisque l'on suppose que Padmasambhava y médita. Remanié au xvie siècle, il se compose aujourd'hui de plusieurs bâtiments accrochés au-dessus du ravin.
Le monastère de rTa-mgo dédié à Hayagriva, dans la région de Thimphou, bâti au xve siècle, est célèbre pour avoir servi de siège à Zhabs-drung et à ses successeurs. Le monastère est dominé par une tour de trois étages, adjonction de 1727. Le toit d'or fut posé au xixe siècle. Son plan est classique. L'entrée principale donne accès à une cour, de laquelle part un escalier qui conduit au vestibule soutenu par des colonnes ; celui-ci précède le temple et ses chapelles adjacentes. Citons enfin lCags-ri ; à deux jours de marche de Thimphou, il fut élevé par Zhabs-drung afin d'y conserver les cendres de son père.
Les temples et monastères sont innombrables au Bhoutan ; il s'en trouve dans les lieux les plus reculés, tel le monastère dédié à Mi-la ras-pa construit au pied du Chomolhari.
mChod-rten
Les mChod-rten, petits monuments votifs, sont encore plus nombreux que les lhakhang. Ils se trouvent à l'intérieur des temples (Krong-sar), au centre des agglomérations (sPa-gro), un peu à l'écart des villes (Zlum-rce lha-khang) ou en pleine nature. À Krong-sar, dans une annexe du grand temple, un mChod-rten haut de plus de quatre mètres, recouvert de plaques de bronze, d'or et d'argent, est le monument funéraire du fondateur du monastère. Autour de lui, huit mChod-rten rappellent les huit actes essentiels du Buddha.
Les mChod-rten se composent d'une base de plan carré surmontée soit d'une maçonnerie en forme de bulbe avec toit conique orné des représentations du Soleil et de la Lune, soit d'une construction cubique. Le modèle népalais inspira le mChod-rten de sKor-ra au nord du bKra-shis-sgang.
Zlum-rce lha-khang à sPa-gro, construit aux environs de 1430, restauré au xive siècle puis au xixe siècle, a la forme d'un stūpa à plusieurs portes et rappelle l'ancien stūpa de Sarnath. La plate-forme du niveau inférieur ressemble à un mandala. Une colonne centrale ronde traverse l'ensemble de la construction à trois étages, dont les murs sont revêtus de peintures à thèmes bouddhiques. Le deuxième étage, entièrement obscur, est consacré aux divinités protectrices.
Architecture civile
L'architecture civile s'inspire de l'architecture religieuse. La maison bhoutanaise, parfois entourée d'une enceinte, s'élève sur un ou deux étages. Le bois se marie heureusement à la maçonnerie pour devenir l'élément décoratif dominant dans les maisons les plus élaborées. Les ouvertures, souvent traitées en forme de jalousies pour protéger du froid, ont des arcs en ogives trifoliées devant lesquelles glissent des panneaux. Les portes sont richement peintes, garnies de motifs en bronze. Galeries et vérandas sont soutenues par des colonnes, les détails de charpenterie sont extrêmement soignés.
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Écrit par
- Benoît CAILMAIL : conservateur des bibliothèques à la Bibliothèque nationale de France
- François DURAND-DASTÈS : professeur à l'université de Paris-VII-Denis-Diderot
- Alain LAMBALLE : lieutenant-colonel d'infanterie, docteur de troisième cycle en sociologie politique
- Chantal MASSONAUD : chargée de mission au musée Guimet
Classification
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Voir aussi
- BHOUTAN ART DU
- 'BRUG-PA
- ZHABS-DRUNG (XVIIe s.)
- WANGCHUK LES
- KRONG-SAR MONASTÈRE DE
- BKRA-SHIS CHOS-RDZONG
- STAG-TSHANG MONASTÈRE DE
- BOUDDHIQUE ART
- SCULPTURE RELIGIEUSE
- HACHE
- STATUE DE CULTE
- RDZONG, monastère fortifié
- PEINTURE MURALE
- BHOTES, BHOTIAS ou BHOTIYAS
- PEINTURE TECHNIQUES DE LA
- DÉMOCRATISATION
- TEMPLE, monde indien
- MCHOD-RTEN ou CHORTEN
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- INDE, histoire : de 1947 à nos jours
- BRITANNIQUE EMPIRE, Asie
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- BOUDDHISME TIBÉTAIN
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- LHAKHANG, temple
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