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BIBLE L'étude de la Bible

Le débat méthodologique des années 1960-1970

La fin des années 1960 et les années 1970 ont été celles d'une crise relativement grave qui toucha l'approche du texte biblique. La manière germanique et luthérienne de traiter celui-ci, laquelle, dans une longue histoire qui va de Gunkel pour l'Ancien Testament à Bultmann et à ses disciples pour le Nouveau, engendra successivement la Formgeschichtliche Methode et la Redaktionsgeschichtliche Methode, passa les frontières géographiques et confessionnelles. L'Église catholique, en France, et jusqu'à Rome, entérina en effet, lentement mais profondément, les procédures de ces méthodes austères et savantes, largement instituées dans les universités d'outre-Rhin. En dépit d'hostilités parfois farouches, on les enseigna, dans les années 1960, quasi officiellement jusqu'à l'Institut biblique pontifical de Rome. C'est au même moment, en 1964 exactement, que le pape Paul VI intervint en personne, publiquement, et tança ceux qui résistaient encore à l'ouverture des études bibliques à la science contemporaine. Dans ce contexte, contemporain voulait dire germanique.

Or on n'allait pas tarder à mettre en cause cette source méthodique, et avec elle, pour une part, la trop grande exclusivité germanique dans l'étude des textes bibliques. Dans le sillage de Mai-68, le savoir exégétique fut immanquablement contesté, parfois radicalement, et avec lui le corps des érudits qui le contrôlaient et le transmettaient. Le commentaire comme voie exclusive d'accès au sens biblique fut sérieusement mis en question. En France, la faculté de théologie des Jésuites de Lyon-Fourvière (aujourd'hui le Centre Sèvres à Paris) y fut pour beaucoup. Un groupe de brillants étudiants gagnés à la linguistique saussurienne y mena l'offensive. Un de leurs professeurs, l'éminent spécialiste de l'Ancien Testament P. Beauchamp, fut un temps leur complice : en 1969, il publia un livre marquant, Création et séparation, où il apparaissait impunément comme « exégète structuraliste ». Dans un séminaire parisien de l'École pratique des hautes études, au même moment, on recourait, pour l'étude des récits évangéliques, aux concepts et modèles de la Sémantique structurale que A. J. Greimas avait publiée en 1966 (voir la revue Langages, no 22, de juin 1971 et l'ouvrage de C. Chabrol et L. Marin Le Récit évangélique, 1974). En septembre 1969, le congrès bisannuel, tenu à Chantilly et préparé par les jésuites lyonnais de l'Association catholique française pour l'étude de la Bible (A.C.F.E.B.), allait mettre ces essais en lumière. Si, à cette date, la présence et les interventions dans cette assemblée du philosophe Paul Ricœur ne pouvaient plus surprendre, la journée dont Roland Barthes fut la vedette s'avéra inconfortable pour nombre de participants. La postérité de ces recherches peut être aperçue dans l'entreprise du bibliste allemand E. Güttgemanns animateur de la revue Linguistica biblica comme dans les travaux menés par le Centre pour l'analyse du discours religieux (Cadir), lié à l'excellent connaisseur du Nouveau Testament J. Delorme, qui a longtemps travaillé à Lyon dans l'orbe du séminaire parisien du regretté A. J. Greimas et publie un cahier trimestriel, Sémiotique et Bible.

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