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BIBLE Les traductions

Les grandes versions anciennes de la Bible

Le souci de faire connaître la Bible à un groupe religieux donné en la traduisant dans sa langue, avec une attention particulière à ses besoins propres, a donné lieu à un certain nombre de traductions anciennes qui ont, en fait, revêtu une valeur fondatrice ou normative. Parmi elles, on peut retenir notamment, outre la traduction latine de saint Jérôme devenue la Vulgate, les versions judaïques des Septante (traduction qui fut ensuite adoptée par le christianisme) des targums et d'Aquila.

La version des Septante

Dès le iiie siècle avant J.-C., les Juifs d'Alexandrie, organisés en un politeuma, entreprirent la traduction en grec, leur langue vernaculaire, de la Loi, écrite en hébreu. Des raisons qui tenaient tant à leur besoin cultuel (lecture synagogale et prédication) qu'à leur souci de propagande et d'apologétique les y poussèrent. La fameuse légende des soixante-dix (soixante-douze) traducteurs, rapportée d'abord par la Lettre d'Aristée avant de connaître une large fortune dans la littérature patristique, valut le nom de Septante à cette traduction.

Le rôle de ce texte grec de la Bible fut déterminant dans le processus d'hellénisation du monothéisme juif, véritable refonte de la culture jusque-là figée dans les modes de pensée et d'expression hébraïques, ouverture qui fit de la Septante la Bible méditerranéenne juive, puis chrétienne. Jusqu'à saint Jérôme, qui, le premier, s'employa à la détrôner, la quasi-totalité de l'Église la considéra comme son Ancien Testament. Elle avait été la Bible des auteurs du Nouveau Testament. À l'exception de la traduction syriaque (Peschitto) et de la Vulgate, et encore avec des nuances, toutes les versions dites anciennes de la Bible furent réalisées à partir de la Septante, que des auteurs juifs, tel Philon, ou chrétiens, tel saint Irénée, considéraient comme inspirée. Aussi n'est-il pas surprenant que les Juifs de la Synagogue, exclusivement pharisiens après la destruction du second Temple (70), aient qualifié le jour de la Septante de néfaste (selon une légende talmudique, les ténèbres auraient recouvert la terre en signe de châtiment) et l'aient exécré à l'égal de la commémoration du veau d'or.

On traduisit d'abord les cinq premiers livres de la Loi (le Pentateuque) ; puis, progressivement, les Prophètes et les Écrits. Cette tâche se poursuivit tandis que les chrétiens, qui adoptèrent d'emblée la Septante comme leur Bible, commençaient à s'organiser en Église. Sur l'origine de cette traduction, deux thèses s'affrontent. La plus classique, adoptée par les deux grandes éditions modernes de Cambridge et de Göttingen, affirme l'existence d'une Septante originaire (Ur-Text, Ur-Septuaginta, Septuaginta-Vorlage) qui aurait connu le destin classique des traditions textuelles : variantes et recensions. La plus séduisante, quoique minoritaire, est la thèse du targum grec. Les Juifs d'Alexandrie auraient traduit la Loi puis les Prophètes à l'instar des targums palestiniens, traductions araméennes, d'abord orales et plus ou moins spontanées, puis écrites (fragmentaires dans un premier temps, parce que déterminées par le découpage textuel du service synagogal, et ensuite regroupant des sections entières de la Bible). En réalité, ces deux thèses ne s'excluent pas systématiquement l'une l'autre.

La Septante, pour une grande part, ne correspond pas à la conception moderne de la traduction. Véritable production biblique, elle manifeste bien des écarts par rapport au texte hébraïque réputé original. Ces « plus » sont de deux ordres. « Plus » quantitatifs : livres deutérocanoniques (Sagesse) ajoutés à des livres canoniques (Daniel, Proverbes). Et « plus » qualitatifs : sens nouveau imputé à certains mots ; dans le Psaume XVI,[...]

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