BIBLIOTHÈQUES
L'avenir des bibliothèques
Placées au centre de la révolution des communications et de la globalisation de la documentation dont le monde est le théâtre, les bibliothèques se trouvent désormais confrontées à des problèmes d'autant plus redoutables qu'elles sont appelées à assurer des missions d'importance croissante.
D'ores et déjà, ces institutions ont beaucoup avancé dans une tâche essentielle : l'organisation de catalogues collectifs en ligne, consultables à domicile et la mise à disposition de bibliographies spécialisées utilisant des systèmes de repérage souples et opérationnels. Il s'agit également pour elles de recourir aux techniques de numérisation afin de mettre au point des procédures permettant de consulter, sur place ou à distance, le plus grand nombre possible d'ouvrages – et d'abord les grands textes – mais aussi d'en faciliter l'étude et l'analyse, notamment au moyen d'outils d'indexation et de liaisons hypertextuelles qui devraient aboutir à de nouvelles formes de lecture. Par ailleurs, devant le programme de numérisation lancé par le moteur de recherche Google, les stratégies publiques de développement ont dû être précisées. Le rapport Tessier sur la numérisation du patrimoine écrit a souligné la nécessité de créer une plate-forme mixte public-privé regroupant la B.N.F., les grandes bibliothèques et les éditeurs. Des accords passés avec les grands opérateurs du Web et des échanges de fichiers numérisés sont également envisagés, afin de parvenir à une mutualisation des ressources. Dans un tel dispositif, Gallica occuperait une place centrale.
Compte tenu des problèmes posés par la fragilité des documents écrits, l'objectif final devrait être de numériser l'essentiel du patrimoine pour le mettre à la disposition du plus grand nombre, et de faciliter le recours à des procédures permettant d'en exécuter des tirages sur papier, éventuellement sous une forme proche de l'original. Certes, cela coûte encore fort cher : la numérisation d'une page de livre revenait en mai 1999 à 10 ou 20 francs – soit, pour le fonds entier de la Bibliothèque nationale, une dépense qu'on pourrait évaluer très grossièrement à 10 000 milliards de francs. Mais on ne doit pas oublier que le coût des nouvelles techniques est en constante diminution.
Cependant, le problème de l'avenir des bibliothèques se pose en fait aujourd'hui en d'autres termes. Quel rôle joueront-elles dans l'élaboration, la diffusion et la conservation de la documentation électronique à l'heure de la communication à distance ?
En tout état de cause, ces établissements semblent voués à une tâche toujours plus délicate : décider des documents qu'il convient de pérenniser – quitte à figer le savoir qu'ils transmettent dans son état d'un jour, afin d'en conserver le témoignage et d'en faire le patrimoine de demain. Mais cela ne saurait suffire. Quelle place tiendront-ils dans la distribution de l'information électronique ? Ils sont déjà nombreux à créer des sites Web. Ceux de la Bibliothèque du Congrès à Washington et de la New York Public Library comptent parmi les plus consultés au monde, et la Bibliothèque nationale de France permet à un résident de Pékin d'exécuter le tirage papier d'un livre numérisé qu'il souhaite lire ou relire. Par ailleurs, les bibliothèques se munissent de collections de documents numérisés fixes, en particulier de CD-ROM. On peut penser que cette activité ira se développant.
En fin de compte, tout dépend des formes que prendra le livre de demain, des fonctions qu'il continuera ou non d'assumer et des manières dont il sera édité et diffusé . Comment déterminer les relations que les établissements actuels entretiendront avec les centres d'édition électronique[...]
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Écrit par
- Henri-Jean MARTIN : professeur émérite à l'École nationale des chartes, directeur d'études à la IVe section de l'École pratique des hautes études
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Médias
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