BIGELOW KATHRYN (1951- )

Regards sur l’histoire américaine

Démineurs (2009), ZeroDarkThirty (2012) et Detroit, scénarisés par Mark Boal, évoquent des traumas récurrents de la société américaine. Démineurs est le premier film prenant pour cadre la guerre en Irak, alors que les films précédents relataient le difficile retour des soldats. Mark Boal a suivi, pour un reportage, une brigade antibombe et a écrit par la suite le scénario du film. Kathryn Bigelow l’a transposé dans son style fait de froideur, de distance et d’une division quasi géométrique de l’espace où se déroulent plusieurs opérations de déminage.

ZeroDarkThirty découpe temporellement la traque d’Oussama Ben Laden – du 11 septembre 2001 à sa mort le 2 mai 2011 – menée par Maya, agent de la CIA, inspirée d’un personnage réel. À ceux qui lui reprochent de montrer des scènes de torture, la cinéaste répond dans les Cahiers du cinéma de février 2013 : « Je me doutais qu’il y aurait des controverses. Il est toujours épineux de tendre un miroir pour susciter un examen de conscience. »

En 2015, après la mort de Michael Brown, abattu de plusieurs balles à Ferguson par un policier blanc, que la justice choisira de ne pas poursuivre, Bigelow a l’idée de réaliser Detroit, Elle reprend, avec Mark Boal, le dossier de l’Algiers Motel incident – dans la nuit du 25 au 26 juillet 1967, en pleine période d’émeutes raciales, trois Afro-Américains furent tués par des policiers blancs, jamais condamnés pour ces crimes. L’approche de Bigelow est plus empreinte de compassion pour les victimes que dans ses deux précédents films. Le problème de l’impunité dont bénéficient les policiers la taraude depuis Strange Days, et l’amène à revenir sur un terreau plus contestataire envers les institutions américaines.