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BIOÉTHIQUE ou ÉTHIQUE BIOMÉDICALE

Répondre aux évolutions de la recherche

Des questions anciennes toujours présentes

Le droit à l’avortement est inexistant dans de nombreux pays. Là où il est reconnu, son encadrement légal est variable ; en outre, il est régulièrement remis en question par des mouvements « pro-vie ». Plus techniques et socialement très sensibles, les nombreuses questions gravitant autour de la procréation médicalement assistée (PMA) – de l’anonymat du donneur de sperme à la gestation pour autrui en passant par le diagnostic préimplantatoire – demeurent controversées et en demande régulière de réévaluation. Il en va de même du droit à l’euthanasie et au suicide assisté, légalement reconnu dans très peu d’États. Ces questions touchent à des croyances religieuses et philosophiques fondamentales relatives à la vie et la mort, et qui sont loin d’être uniformément partagées. La définition de la mort clinique de l’individu identifiée à la mort du cerveau (Harvard, 1968) demeure minoritaire face aux critères de l’arrêt du cœur et de la respiration, seuls indices du départ de l’âme. Les conséquences de ces désaccords sont considérables ; elles vont des pratiques abortives et euthanasiques clandestines dans de mauvaises conditions sanitaires à la persistance du manque d’organes que la redéfinition de la mort visait à atténuer. L’infinie discussion autour du statut du corps est elle aussi associée à ce problème de la rareté: l’individu est-il propriétaire de son corps et peut-il décider de vendre ses tissus et organes ? Est-ce contraire à la dignité humaine, dont l’individu n’a pas à décider ? Semblable commercialisation est-elle une porte ouverte aux pires exploitations et injustices dans un monde inégalitaire ?

De la bioéthique inspirée de Kant à l’éthique utilitariste, ces questions demeurent débattues sans qu’aucun consensus ne soit en vue. Mais le débat n’est pas seulement éthique. En vue de sa traduction dans la pratique médicale, un consensus éthique doit être politiquement assumé et juridiquement formalisé. Les exemples « simples » de l’avortement et de l’euthanasie suffisent pour montrer que ce passage de la bioéthique au biodroit via la biopolitique n’est ni fluide ni univoque.

Des questions renouvelées

La réactualisation des questions est le plus souvent le produit d’avancées techno-scientifiques. La mise au point d’une nouvelle technologie d’intervention dans le génome (geneou genomeediting) dénommée CRISPR, apparue en 2012, a ravivé une foule d’inquiétudes et d’espoirs. En 2016, le Nuffield Council y consacre un important rapport : GenomeEditing. An ethicalreview. CRISPR permet de cibler une séquence ADN ou ARN de façon beaucoup plus précise et fiable que le génie génétique antérieur ; elle permet ainsi de modifier des caractères structurels et fonctionnels des organismes vivants. C’est toute la problématique de l’eugénisme négatif et positif, somatique et germinal, qui opère un retour en force dans la mesure où les perspectives pratiques sont devenues plus réalistes que jadis. Dans la foulée, des possibles dans lesquels on avait placé beaucoup d’espoirs il y a quelques décennies mais qui avaient été déçus refont surface. C’est le cas de la xénotransplantation : le transfert à l’homme d’organes rendus compatibles et sûrs (par désactivation de rétrovirus endogènes) prélevés sur des animaux (des porcs).

À l’origine de la bioéthique, Potter insistait sur la nécessité d’articuler les questions d’éthique médicale et les problèmes environnementaux et démographiques suivant une approche globale, holistique. Sous la poussée, notamment, des risques climatiques, cette perspective d’une bioéthique intégrant les questions écoéthiques revient en force : en 2015, le CCNE publie, en marge de la COP21, un avis qui invite à Repenser la place de[...]

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Écrit par

  • : membre de l'Académie royale de Belgique, professeur émérite de l'université libre de Bruxelles (Belgique)

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Média

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