WIDERBERG BO (1930-1997)
Bo Widerberg est né le 8 juin 1930 à Malmö (Suède) où il passe son enfance et son adolescence, fait ses études et commence sa vie professionnelle, en pratiquant divers métiers, dont celui de rédacteur du service de nuit d'un journal local. Grand lecteur, il s'oriente, à partir de 1950, vers la littérature ; il publie notamment, au cours de cette décennie, quatre romans et deux recueils de nouvelles. À partir de 1960, il devient journaliste et critique de cinéma dans différents organes de presse et s'y distingue par des articles virulents ; dans certains d'entre eux il encense la nouvelle vague et attaque Ingmar Bergman, avec lequel il s'était pourtant lié d'amitié quand celui-ci venait mettre en scène des pièces au théâtre municipal, en l'accusant de dominer la cinématographie suédoise et de faire des films « vides ». En 1962, il publie un ouvrage, nourri de ses articles, sur le cinéma suédois : Visionen i svensk Film (Regards sur le cinéma suédois).
En 1961, Bo Widerberg cosigne avec Jan Troëll un court-métrage inspiré d'un récit de William Saroyan : Pöjken och Draken (Le Petit Garçon et le cerf-volant). Il écrit et réalise presque aussitôt après son premier long-métrage : Barnvagnen (La Voiture d'enfant), distribué en France sous le titre Le Péché suédois. Cette comédie dramatique, construite sur les relations d'une jeune mère célibataire avec ses deux amants, se caractérise par son ancrage dans un réalisme social documentaire qui va être au cœur de son film suivant : Kvarteret Korpen (Le Quartier du corbeau, 1963), chronique de la vie d'une famille de prolétaires dans un quartier ouvrier de Malmö au cours de l'année 1936. Ce film fait de lui un des chefs de file du jeune cinéma suédois. Il tourne ensuite Karlek 65 (Amour 65, 1965), à partir duquel il assurera, outre le scénario et la réalisation, le montage, seul ou en collaboration, de tous ses films, Heja Roland (Salut Roland, 1966), puis Elvira Madigan (1967), qui l'impose comme réalisateur de renom international. Avec cette histoire d'amour fou, inspirée d'un tragique fait divers qui fit scandale, Bo Widerberg aborde pour la première fois la couleur, dont il use de manière impressionniste, non sans afféterie ni maniérisme. Cette tendance apparaît d'autant plus prononcée dans les deux films suivants, Adalen 31 (1969) et Joe Hill (1971), qu'il s'agit là d'œuvres « engagées » : le premier évoque les grandes grèves de 1931, le second relate la vie du chanteur syndicaliste américain d'origine suédoise, Joel Hillström.
Bien que ces films connaissent un franc succès public et critique (tous deux sont lauréats du prix spécial du jury à Cannes), Bo Widerberg ne revient derrière la caméra que trois ans plus tard pour Fimpen (Tom Foot), une fable ironique sur le football, fort éloignée de ses habituelles préoccupations stylistiques et thématiques. Ce film constitue un tournant dans sa carrière ; désormais, sa fréquence de tournage se ralentit, ses scénarios ne sont plus originaux mais reposent sur des adaptations littéraires, et la critique de la société suédoise n'apparaît plus qu'en filigrane. Ainsi en est-il de Mannen på Taket (Un flic sur le toit, 1977), Victoria (1979), Mannen från Mallorca (L'Homme de Majorque, 1984) et Ormens vag pa halleberget (Le Chemin du serpent, 1986).
Après cette dernière œuvre, qui le ramène brièvement sur la scène internationale, Bo Widerberg délaisse le cinéma pour se consacrer exclusivement à la mise en scène théâtrale, activité qu'il avait entreprise au début des années 1960 et toujours menée parallèlement à son activité cinématographique. En 1995, il signe finalement Lust och fägring stor (La Beauté des choses), film en grande partie autobiographique, avec lequel il renoue avec l'inspiration de ses[...]
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Écrit par
- Alain GAREL : critique et historien de cinéma, professeur d'histoire du cinéma
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