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BONHEUR MARIE ROSALIE dite ROSA (1822-1899)

<it>Moutons dans les Highlands</it>, R. Bonheur - crédits :  Bridgeman Images

Moutons dans les Highlands, R. Bonheur

La Bordelaise Rosa Bonheur a sans doute été, plus que Troyon par exemple, le peintre animalier le mieux aimé et le plus célèbre de la seconde moitié du xixe siècle. L'impératrice Eugénie, puis le président Carnot ne se déplacèrent-ils pas pour lui conférer la croix, puis la rosette de la Légion d'honneur ! La vente aux États-Unis du Marché aux chevaux (exposé au Salon de 1853 et acquis plus tard grâce à Vanderbilt par le Metropolitan Museum) a été suivie avec passion ; ne reprochait-on pas du reste à l'artiste de trop vendre aux amateurs anglo-saxons, au risque de diminuer le patrimoine français ?

Sans avoir reçu d'enseignement académique, formée directement par son père qui était professeur de dessin, Rosa Bonheur expose régulièrement depuis 1841 des scènes d'animaux et assure définitivement sa célébrité avec son Labourage nivernais (Salon de 1849, ancien musée du Luxembourg, musée d'Orsay, Paris).

Dans le genre animalier, elle apparaît comme le meilleur représentant des tendances naturalistes des années 1850-1860. Alors que Barye, par son exotisme et son sens de l'énergie animale, est évidemment un romantique, alors que Troyon dépasse le réalisme par son lyrisme de la couleur et de la pâte, tandis que Brascassat fait assez péniblement entrer ses animaux dans des scènes héroïques à la James Ward, Rosa Bonheur s'intéresse surtout à la traduction anatomique et au rendu des robes et des pelages. À partir de nombreuses et remarquables esquisses sculptées, elle exprime avec une exactitude scrupuleuse les caractères propres aux différentes races. Ses animaux préférés, plus encore que les trop célèbres moutons, sont les bovidés, dont elle sait à merveille rendre la force placide. Certes, sa couleur est souvent faible, comme le lui reprochait Thoré-Bürger ; certes, ses grandes compositions, malgré leur ambition (Le Marché aux chevaux évoque trop les Chevaux barbes de Géricault), se résolvent presque toujours en simples juxtapositions. Mais Rosa Bonheur a un sens évident de la respiration et de la vie animales. Mieux que ses tableaux achevés, ses études témoignent de son métier et de son goût de peindre et elle mérite finalement la comparaison souvent proposée, et que son art appelait, avec Paul Potter. Dans la tradition du genre animalier, Rosa Bonheur illustre parfaitement le réalisme français des années 1860, où respirent la sympathie et l'émotion devant le motif.

— Bruno FOUCART

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