BONIFACE VIII (1235-1303)
Il est à la fois suggestif et déroutant d'observer comment les personnes deviennent, dans leur destin posthume, des personnages symboliques. L'historien a quelque peine à discerner, sous la matérialité des faits, les traits authentiques de l'homme et les projections de ses actes dans la suite des événements. Le pape Boniface VIII jouit, si l'on peut dire, de ce privilège ambigu, en un temps de crise pour la chrétienté et la civilisation politique de l'Occident médiéval.
L'homme
Benedetto Caetani fut élu pape le 24 décembre 1294, alors qu'il approchait de la soixantaine. Élection régulière, mais déjà compromise, car elle lui conférait le pontificat suprême après l'abdication, nécessaire et troublante, de son prédécesseur, Célestin V, dont la sainteté ingénue allait nourrir l'opposition à un pape politique. Et la conjoncture, et le tempérament, et sa carrière antérieure conduisaient Boniface à diriger l' Église de manière plus politique qu'évangélique. Grand, robuste, l'air majestueux, avec de belles mains, longues et soignées, tel que le montre son effigie funéraire que sculpta Arnolfo di Cambio de son vivant, tel que le virent ceux qui ouvrirent sa tombe en 1605, il était victime d'un tempérament impulsif, irritable, aggravé par des crises de maladie de la pierre, par le goût des déclarations pompeuses, par la conviction sommaire de son suprême pouvoir. Il n'a point, cependant, les vices médiocres que lui attribuent ses adversaires. C'est un petit baron féodal de la campagne romaine, qui, malgré ses voyages et ses relations, à Paris en particulier, n'avait pas compris la nouveauté politique, la valeur humaine, la validité chrétienne des nations, en face du Saint Empire, dont il se jugeait le digne partenaire dans une monarchie universelle.
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Écrit par
- Marie-Dominique CHENU : docteur en théologie, ancien professeur à l'université de Paris
Classification
Média
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