BOUDDHISME (Histoire) L'expansion
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Le bouddhisme, issu d'un modeste district de l'Inde gangétique, s'est répandu, non sans se modifier, sur une grande partie de l'Asie et est devenu, avec le christianisme et l'islam, une des trois grandes religions mondiales. Aujourd'hui, Sri Lanka, la Birmanie, la Thaïlande, le Laos, le Cambodge sont des pays entièrement bouddhistes, relevant du Petit Véhicule. Le Japon compte plus de 40 millions de bouddhistes, appartenant à diverses sectes. Le Tibet demeure attaché, en dépit de l'occupation étrangère, au bouddhisme du Grand Véhicule sous la forme du lamaïsme. Le bouddhisme joue un rôle important au Vietnam et en Corée, mais il n'a plus en Chine d'existence officielle.
C'est au début du iie siècle après l'entrée du Buddha dans le nirvāṇa, au milieu du iiie siècle avant notre ère, sous le règne du grand empereur Aśoka, le Maurya, que s'est affirmée la vocation missionnaire du bouddhisme. À l'issue d'un concile réuni à Pāṭaliputra (Pāṭnā) sous la présidence de Tissa Moggaliputta, des missionnaires furent envoyés dans des provinces indiennes et aussi dans les pays limitrophes de l'Inde : en pays marathe, dans l'Inde de l'Ouest (Aparānta), au Cachemire, à Sri Lanka. Certes, l'envoi d'un missionnaire n'entraîne pas la constitution d'une Église et la conversion de tout un peuple. Pour la Birmanie, par exemple, les premiers documents sûrs sont de huit siècles postérieurs au concile de Pāṭaliputra. Il faut pourtant retenir au moins comme historique la conversion précoce du Gandhāra et du Cachemire par Madhyāntika et de Sri Lanka par Mahinda ou Mahendra, fils (ou frère) d'Aśoka. Du reste, certaines idées bouddhiques ont pu à cette époque être diffusées fort loin, peut-être jusqu'en Grèce.
En Asie centrale et en Chine
À en croire un texte obscur, dès l'an 2 avant J.-C., un fonctionnaire chinois, en mission auprès du roi Hima Kadphisês, aurait reçu oralement du prince héritier le premier texte bouddhique. En 65 de notre ère, un prince Han, Mingdi, aurait protégé la première communauté bouddhique implantée en Chine. C'est alors que furent traduits en chinois, par les Indiens Mataṅga et Gobharaṇa, plusieurs livres, parmi lesquels le Sūtra des 42 articles, qui jouit d'un grand prestige, mais qui n'était peut-être qu'un choix de sentences.
Au iie siècle, le bouddhisme fit en Chine et en Asie centrale des progrès considérables, à l'issue d'un concile réuni sous le règne du roi Kanishka à Jalāndhara, dans le haut Penjāb. L'Inde du Nord-Ouest, à la suite d'invasions, se trouvait alors en relations renouvelées avec le monde iranien et l'Asie centrale. Le roi lui-même, nouveau converti sur lequel le docteur Açvaghosha exerça, selon la tradition, une influence profonde, fit venir en Inde de jeunes princes de Sérinde, qui s'initièrent dans les couvents indiens à la civilisation indienne et à la Loi bouddhique.
C'est par l'intermédiaire de ces oasis d'Asie centrale, échelonnées au pied du Karakoram et des Kunlun, au sud, des Tianshan, au nord, à Yarkand, Khotan, Agni, Koutcha, que le bouddhisme parvint en Chine. L'art d'Asie centrale porte témoignage de cet épanouissement admirable du bouddhisme, pendant tout le haut Moyen Âge dans le Turkestan chinois, de manière plus éloquente encore que les documents paléographiques retrouvés dans les sables par diverses missions (Paul Pelliot). C'est par cette voie que des influences helléniques mêlées d'influences iraniennes et indiennes parvinrent jusqu'à la Chine des Wei et au Japon de Hōryū-ji.
Les premiers traducteurs qui s'ingénièrent à faire passer dans la langue chinoise, de structure fort différente des langues de l'Inde, la pensée bouddhique furent des Sogdiens, des Yuezhi, des Koutchéens et même un Parthe, un peintre arsacide, An Shigao, qui vécut en Chine de 148 à 170.
Le bouddhisme avait en effet gagné l'Iran, et Kartir, l'accusateur de Mani, se vante aux environs de 280 d'avoir persécuté, à côté d'adeptes d'autres religions, des bouddhistes. La renaissance nationale en Perse s'opposa à l'implantation du bouddhisme et à son expansion vers l'Occident.
À l'époque des Trois Royaumes, un Yuezhi (Zhiqian), un Sogdien (Senghui), effectuent de nombreuses traductions. Sous les Jin occidentaux, Fahu (Dharmaraksha, 265-308), homme d'une remarquable culture, poursuit leur œuvre. Enfin, Kumārajīva (344-413), fils d'une princesse koutchéenne qui avait étudié au Cachemire et d'un moine indien, délié de ses vœux pour ce rôle providentiel, s'installa après la conquête de Kutcha à Chang'an, en compagnie de son maître indien.
D'autres érudits se firent à sa suite grands voyageurs par ferveur religieuse, tel Buddhabhadra ; et des Chinois se rendaient au Cachemire pour y étudier déjà ce qu'on appelait le dhyāna, forme de yoga. En 518, 2 213 ouvrages étaient déjà traduits. La première impression xylographique de textes bouddhiques date de 972.
Plusieurs collections complètes du canon chinois existent encore, non en Chine, mais au Japon.
Par la suite, les grands pèlerins (Faxian, Song Yun, Xuanzang, Yijing) appartiennent à l'histoire des grandes relations entre aires de civilisation. De même l'évolution ultérieure du bouddhisme, les persécutions (4 600 couvents, 40 000 bâtiments religieux détruits en 845, 260 000 religieux réduits à l'état laïque), sa transformation, due parmi des causes diverses à l'impossibilité de rendre littéralement en chinois les textes indiens, la contamination du bouddhisme par le confucianisme et le Tao, l'étude des écoles, dont les principales sont celles des fidèles d'Amitābha (« école de la Terre pure » : Jingtuzong ; « école de la méditation » : Xinzong, sanskrit dhyāna, chinois chan) et celle « des secrets » (Mizong), relèvent de l'histoire propre du bouddhisme chinois.
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Écrit par
- Jean NAUDOU : professeur à l'université de Provence
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Médias
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