BOUDDHISME (Histoire) Le renouveau contemporain
Le bouddhisme fut, dès la fin du Ier millénaire de l'ère chrétienne, chassé de bien des régions d'Asie centrale et d'Asie du Sud-Est par l'expansion de l'islam. Sous la colonisation et au temps de la prééminence mondiale des puissances européennes, il sembla perdre encore davantage de son importance. S'opposant à cette évolution, apparurent au xviiie et au xixe siècle dans des régions non encore colonisées – sur les hauts plateaux du Kandy à Ceylan (Sri Lanka), en Birmanie (Myanmar) et au Siam (Thaïlande) – des tentatives de réforme traditionaliste, encouragées par les rois de ces régions. L'extension de la domination coloniale et l'emprise grandissante de la civilisation occidentale au xixe siècle rendirent cependant la confrontation avec le christianisme et la pensée européenne inéluctable. C'est alors, et alors seulement, qu'apparut ce mouvement moderne de rénovation bouddhiste que l'on désigne du nom de « bouddhisme moderniste ». Issu tout d'abord, et surtout, des classes moyennes cultivées, il s'associa bientôt étroitement au nationalisme et aux mouvements d'indépendance.
Modernisme et tradition
Le Sri Lanka, où le bouddhisme avait survécu à une confrontation au christianisme qui durait depuis le xvie siècle, joua un rôle clé dans cette évolution. Dès 1865, plusieurs disputes publiques opposèrent moines bouddhistes et prêtres chrétiens, la plus célèbre étant la « Grande Dispute de P̄anadur̄a » en 1873. Les travaux scientifiques du xixe siècle sur le domaine indien jouèrent également un grand rôle dans le « bouddhisme moderniste ». Le soin mis par les chercheurs et philosophes européens à déchiffrer les manuscrits bouddhiques, l'admiration exprimée dans leurs œuvres pour les enseignements du bouddhisme primitif contribuèrent à ranimer l'intérêt des bouddhistes pour leur propre doctrine et les incitèrent à se défendre contre l'emprise culturelle de la civilisation occidentale. Dans ce contexte, on peut citer : le philosophe allemand Arthur Schopenhauer (1788-1860), qui se désignait lui-même comme bouddhiste et dont les œuvres furent beaucoup lues dans toute l'Europe de la fin du xixe siècle ; sir Edwin Arnold (1832-1904), auteur du célèbre poème « The Light of Asia » (1879) ; le théosophe américain Henry Steel Olcott (1832-1907), ainsi que trois érudits qui peuvent être considérés à juste titre comme les fondateurs de la recherche moderne sur le bouddhisme, le Français Eugène Burnouf (1801-1852), l'Anglais Thomas William Rhys Davids (1843-1922) et l'Allemand Hermann Oldenberg (1854-1920). C'est ainsi au début du xxe siècle que des Européens entrèrent pour la première fois dans les ordres monastiques bouddhistes : en 1902, à Akyab en Birmanie, l'Anglais Allan Bennett McGregor (1872-1923) sous le nom de ̄Ananda Metteyya, et en 1904, à Rangoon en Birmanie, le violoniste allemand Anton Gueth, qui prit le nom de Nyanatiloka et mourut en 1957 à Sri Lanka. La personnalité la plus influente en ces débuts du bouddhisme moderniste fut certainement le Singalais David Hewavitarne (1864-1933), connu comme religieux sous le nom de Anaḡarika Dharmap̄ala. Fondateur en 1891 de la première société bouddhique internationale, la Mah̄abodhi Society, il réussit par son action à propager la religion bouddhiste en Inde, son pays d'origine, dont elle avait, depuis le xiie siècle, presque complètement disparu, et ce surtout dans les classes moyennes cultivées. Depuis 1892, la Mah̄abodhi Society a établi son siège à Calcutta. La collaboration internationale entre adeptes issus de presque toutes les confessions bouddhistes – en d'autres termes, un mouvement bouddhiste œcuménique moderne – ne fut institutionnalisée qu'en 1950, lors de la fondation du World Fellowship of Buddhists (W.F.B.). Au cours de sessions que[...]
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Écrit par
- Heinz BECHERT : professeur à l'université de Göttingen, Allemagne
Classification
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