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BOYCOTTAGE

Le boycottage dans les relations de travail

Le boycottage est un moyen de lutte traditionnel dans les relations de travail ; dès le xvie siècle, il fut employé par des compagnons contre des maîtres. Il tend à empêcher les employeurs ou salariés visés à conclure des contrats de travail. Il peut émaner de syndicats d'employeurs, ou plus rarement d'employeurs agissant seuls, à l'encontre de travailleurs, ou, réciproquement, de syndicats d'ouvriers ou d'employés, qui « mettent à l'index » soit des employeurs, soit d'autres travailleurs, en menaçant de grève les employeurs qui les embaucheraient. Il est nécessairement « indirect » et « qualifié » lorsqu'il émane de salariés et vise d'autres salariés, car il ne peut alors opérer que par l'intermédiaire des employeurs incités à ne pas embaucher ; mais il peut être « direct » – d'employeurs à salariés – et réciproquement.

À l'exception de l'Italie, où l'article 507 du Code pénal a fait un délit du boycottage tendant à empêcher la conclusion de contrats de travail ou la fourniture de matières et instruments nécessaires au travail, et pour partie des États-Unis, où les lois Taft-Hartley de 1947 et Landrum-Griffin, de 1955, ont condamné le boycottage indirect (secondary boycott) par les syndicats, le boycottage dans les relations de travail n'a été que rarement considéré comme un moyen illicite en soi dans les autres pays occidentaux.

Il en était autrement en France, sous l'empire du Code pénal de 1810, dont l'article 416 réprimait le boycottage en tant que coalition contraire à la liberté du commerce, de l'industrie et du travail ; mais ce texte a été abrogé par la loi de 1884 sur les syndicats professionnels. Depuis lors, la « mise à l'index » est bien neutre, du point de vue juridique, et sa licéité est admise dans tous les cas où cette mesure a pour objet la défense d'intérêts professionnels. La Cour de cassation avait posé ce principe dès la fin du xixe siècle, et elle l'a encore implicitement rappelé, après la Seconde Guerre mondiale, dans l'affaire Cortot : elle a en effet condamné la mise à l'index du célèbre pianiste, décidée par un syndicat de musiciens parce qu'il avait accepté la présidence d'un comité professionnel pendant l'occupation allemande ; car, en agissant ainsi, le syndicat avait pris une mesure de caractère répressif, complètement étrangère aux intérêts de la profession. En revanche, les mises à l'index motivées par une appartenance politique ou syndicale, ou réciproquement par le refus d'adhérer à un syndicat (système de closed shop instaurant un monopole syndicale d'embauche), sont jugées illicites, car elles portent atteinte à la liberté politique et syndicale.

Des solutions comparables ont été admises en république fédérale d'Allemagne où le boycottage dans les relations de travail a pratiquement disparu dans les années 1960 en raison du plein emploi de l'époque et des hauts salaires. Mais, selon la jurisprudence antérieure, la mise à l'index n'était pas illicite en soi ; elle le devenait, en tant que comportement « contraire aux usages » (Sittenwidrig), lorsque son but était illégitime, lorsqu'elle s'accompagnait de voies de fait, ou enfin lorsqu'elle était disproportionnée à l'objet poursuivi ; ces solutions conservent toujours leur valeur. En Suisse aussi, la mise à l'index est licite lorsqu'elle a pour but la défense de l'organisation professionnelle. En Belgique, elle ne fait pas davantage l'objet d'une prohibition générale ; mais les dispositions de la loi du 24 mai 1921, garantissant la liberté d'association, feraient obstacle au boycottage qui viserait à contraindre un travailleur à adhérer ou à ne pas adhérer à un syndicat.[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-II, président honoraire
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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