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BRÉSIL La littérature

La tradition portugaise

On trouve les marques d'une littérature brésilienne en devenir dans les louanges de la nouvelle « terre promise » qui remplissent nombre d'ouvrages descriptifs consacrés au Brésil au cours des xvie et xviie siècles ; dans l'œuvre du père José de Anchieta (1534-1597), missionnaire, poète et auteur d'un théâtre de catéchèse qui n'est pas dépourvu d'intérêt littéraire ; chez Gregório de Matos Guerra (1633-1696), poète sacré et satirique, d'inspiration baroque ; et dans l'œuvre immense, par son étendue et par sa valeur, du père Antônio Vieira (1608-1697), qui domine la littérature portugaise du xviie siècle. Ce sont les trois noms principaux qu'on pourrait retenir pour la période de formation de la nouvelle civilisation. Mais on ne constate pas, avant la seconde moitié du xviiie siècle, l'existence d'un groupe d'écrivains qui partagent la conscience de faire une œuvre reflétant ou illustrant l'ethnie brésilienne. Dès lors, l'activité littéraire cède la place à une littérature naissante, dont le point de départ peut être fixé conventionnellement à la date de publication de la première œuvre marquante.

Le début du xviiie siècle voit la fondation de nombreuses académies, ou sociétés littéraires, quelques-unes éphèmères, où domine une esthétique néo-classique. Cláudio Manuel da Costa (1729-1789), auteur de transition, conservateur, le moins brésilien des écrivains de cette période, donna le meilleur de son œuvre dans des sonnets de ses Obraspoéticas (Œuvres poétiques, 1768). José de Santa Rita Durão (1722-1784) publie en 1781 un poème épique, Caramuru, surchargé d'érudition, dans lequel, influencé par les Lusiades de Camões (1525-1580), il chante les aventures d'un des pionniers de la colonisation portugaise. Dans son Uraguai (1769), Basílio da Gama (1741-1795) décrit la lutte entre Portugais et Espagnols, d'une part, et entre les tribus indiennes, d'autre part. D'une inspiration plus lyrique qu'épique, le thème indien est traité avec plus d'art que dans Caramuru, mais le sujet est trop mince et le poème souffre du parti pris de son auteur qui se fait l'apologiste de la politique du marquis de Pombal, adversaire des jésuites. L'œuvre d'Inácio José de Alvarenga Peixoto (1744-1792) est restreinte et irrégulière : quelques sextilhas, trois odes inachevées, des vers épars, et surtout une vingtaine de sonnets parmi les plus achevés de l'époque. Manuel Inácio da Silva Alvarenga (1749-1814) est l'auteur d'un poème héroï-comique, O Desertor (Le Déserteur des Lettres, 1774) et surtout de Glaura(1799), recueil lyrique composé de « rondeaux » de son invention, d'inspiration italienne, et de madrigaux. Il est le premier à sentir et à exprimer certaines nuances de la sensibilité brésilienne, certain frémissement de volupté à fleur de peau qu'il chante à la sourdine d'une manière incomparable qui permet à certains de mettre Glaura au-dessus de Marília de Dirceu (première partie, 1792 ; deuxième partie, 1799 ; troisième partie, d'authenticité suspecte, 1800), chef-d'œuvre de Tomás António Gonzaga (1744-1810). Celui-ci, après une jeunesse passée au Brésil et des études à Coïmbre, fait carrière de magistrat au Portugal, avant d'être nommé à Vila Rica (aujourd'hui Ouro Preto) en 1782. Il s'y lia d'amitié avec Cláudio Manuel da Costa et Alvarenga Peixoto, et s'éprit d'une jeune fille, Marília – « Dirceu » est le surnom arcadien de Gonzaga –, mais, malheureusement, alors qu'il attendait l'autorisation royale de l'épouser, il est accusé de complicité dans un complot (1789) visant à libérer le Brésil de la tutelle portugaise (inconfidênciamineira) et condamné à dix[...]

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, chargé de recherche au CNRS
  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Poitiers
  • : professeur des Universités
  • : maître de conférences honoraire de littérature comparée, université de Paris-X-Nanterre

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