BRIL ou BRILL PAUL (1554-1626)
Figure importante de la peinture de paysage des premières années du xviie siècle, Paul Bril est l'un des initiateurs de la vedute composée. Nordique transplanté en Italie, il exerce là une immense influence par son rôle capital d'artiste de transition entre le paysage maniériste fantastique et le paysage composé classicisant.
Après une formation anversoise (chez un certain Damiaen Ortelmans), Bril, en 1574, passe en France par Lyon pour se rendre comme tant d'autres à Rome où son frère Matthys était installé (ce dernier est déjà décédé en 1583). Dès 1582, la présence de Bril à Rome est attestée, et même sans interruption de 1593 à sa mort. En 1606, il est témoin du mariage du peintre Elsheimer, ce qui confirme l'importance de sa position dans le monde artistique romain, si profondément internationalisé. Sous l'influence de son frère, Bril s'adonna, à Rome, à la fresque, déployant une considérable activité de paysagiste décorateur dans les églises et les palais papaux ou cardinalices. Son style évolue alors d'un maniérisme compliqué et agité, proche de la manière de Girolama Muziano, à une sorte de classicisme fortement construit, aux éléments simplifiés, qui se ressent de l'influence d'Annibal Carrache. Ce n'est qu'assez tard, tout à la fin du xvie siècle, que Bril commence à peindre sur chevalet et dans une inspiration un peu différente : paysages souvent agrémentés de scènes mythologiques et marqués par des effets de soleil et de lumière d'une grande qualité. Ainsi, dès avant la venue d'Elsheimer, il préfigure une évolution fondamentale du paysage italianisant, de Swanewelt et de Claude aux Bamboccianti, de Poelenburgh et de Both à Vanvitelli. Après 1600 et comme dans la fresque, la virtuosité maniériste, les effets piquants et contrastés, les aménagements décoratifs et irréalistes se simplifient dans une manière plus large et plus solidement construite. L'alternance des zones sombres et claires, le jeu successif des bleus, des verts et des jaunes deviennent le schéma habituel de ces vues à coulisses agréablement disposées, aux profondes perspectives, parcourues d'un puissant et sourd lyrisme végétal et luministe. La réputation de Bril fut immense et, en 1620 déjà, un amateur romain comme Mancini le mettait au premier rang des paysagistes, après Carrache. Que l'on nomme des Italiens comme Tassi, Filippo Napoletano, Grimaldi, l'Albane, Domenichino ou des Nordiques comme Poelenburgh et Breenbergh, Nieulandt, Lyss ou Van Laer, ou même Claude ou Rubens, leur dette à l'égard de Bril est évidente.
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Écrit par
- Jacques FOUCART : conservateur des Musées nationaux, service d'études et de documentation, département des Peintures, musée du Louvre
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