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BROCART

Étoffe très riche, décorée par le tissage de fils d'or ou d'argent, et dans laquelle la soie sert essentiellement de support et de lien au métal qui joue avec tout son éclat, tant dans le fond du tissu que dans les différentes parties du dessin. L'emploi des tissus dans lesquels on fit entrer de l'or est très ancien, comme en témoignent divers écrits, mais sous ce terme de brocart (dont les documents nous apprennent qu'à l'origine ils étaient des tissus tout d'or ou d'argent) ont été classées à tort quantité de soieries contenant du métal, les brochés par exemple. On peut dire que les brocarts, dont on ignore l'origine exacte, mais dont on est sûr qu'ils ont été créés en Orient, appartiennent à la famille des draps d'or, draps à or battu ou à battus d'or, draps de soie à or ouvré, qui furent très prisés en Occident dès le Moyen Âge. L'Italie, l'Espagne (Almería notamment) s'étaient rendues célèbres dès le xiie siècle par la fabrication des brocarts. D'après les chroniqueurs, les draps et toiles d'or et d'argent s'étalaient à profusion au camp du Drap d'or où eut lieu la célèbre entrevue de François Ier et d'Henry VIII, en 1520. Ce genre d'étoffe semble avoir été particulièrement apprécié en France, et dès le xviie siècle l'on en fabriquait à Lyon, à Tours et à Paris. Dans cette dernière ville, le brocart d'or était d'ailleurs l'un des tissus sur lequel ceux qui désiraient être reçus maîtres ouvriers en drap d'or, d'argent et de soie devaient exécuter leur chef-d'œuvre.

Le tissage de tels tissus n'était pas sans présenter des difficultés. Tout d'abord, le métal devait subir une préparation. L'or n'était plus battu comme jadis, mais étiré en une lame très mince et très souple que l'on obtenait par laminage d'un fil déjà fin et ductile dû au passage du métal dans une filière. Cette lame, appelée aussi or trait, était ensuite, et c'était là le travail du guimpier, enroulée en spirale sur une âme, c'est-à-dire un support, autrefois en baudruche, plus tard en coton et parfois en soie. Quant aux fils d'argent, ils étaient enroulés sur une âme de couleur blanche, suivant les mêmes procédés. Plus les spires étaient serrées, donnant des fils ou filés continus et arrondis, plus le filé avait de prix. En variant les supports, leur préparation, le guimpier pouvait obtenir des produits plus ou moins torsadés, plus ou moins brillants, tels le frisé, la cannetille, qui furent également utilisés en broderie. On employa aussi sous l'Empire un filé nommé sorbec dont l'âme de couleur s'apercevait entre les spirales d'or. Ces filés étaient davantage utilisés en trames qu'en chaîne car ils souffraient moins ainsi du travail du peigne qui sert à tasser les trames lors du tissage, et l'on s'arrangeait toujours à tirer le meilleur effet du métal en le faisant passer le plus possible à l'endroit du tissu auquel il était lié de la façon la moins visible. L'opération était encore plus délicate lorsqu'il s'agissait d'incorporer à plat aux fils de soie, toujours fragiles, les lames métalliques telles qu'elles étaient au sortir du laminoir, donc encore tranchantes, pour obtenir les tissus dits lamés qui sont particulièrement brillants.

Les brocarts, que l'on peut encore enrichir par divers artifices de tissage permettant d'atteindre aux effets les plus somptueux, ont été fort utilisés pour les robes, les habits et les ornements d'église, mais, en raison de leur prix, leur emploi dans l'ameublement est limité à quelques cas exceptionnels.

— Évelyne GAUDRY

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